Avec son équipe, un prêtre, le père Desbois, prétend avoir découvert en Ukraine des centaines de fosses contenant des centaines de milliers de juifs victimes de la « Shoah par balles ».
La « Shoah par balles » en Ukraine :
l’enquête bidon du père Desbois
Objectif de l’étude
Depuis plusieurs mois, les médias ne cessent de parler du père Patrick Desbois et de son enquête sur le (supposé) massacre systématique des juifs en Ukraine par les Allemands entre 1941 et 1944.
Du 20 juin au 30 novembre 2007, à Paris, le Mémorial de la Shoah y a consacré une exposition intitulée : « Les fusillades massives de juifs en Ukraine, 1941-1944. La Shoah par balles » (Dépliant de présentation ci-contre).
Je l’ai visitée et j’ai acheté le catalogue de l’exposition avec les deux DVD de « témoignages » filmés.
L’objectif de ce travail n’est pas d’apporter une conclusion définitive sur cette « Shoah par balles » ; le sujet est en effet trop vaste pour être étudié en quelques semaines, voire en quelques mois. J’ajoute que ce travail ne portera non plus sur la personne du P. Desbois.
Fidèle à ma ligne de conduite, je refuse d’entrer dans ce type de querelles totalement stériles. Qui est P. Desbois et quelles sont ses possibles motivations ? Je m’en moque complètement. Il a réalisé une enquête, c’est son droit. C’est elle, et elle seule, que je vais juger par le biais de l’exposition vue à Paris.
Je me suis donc volontairement limité à répondre à la question suivante : l’exposition et son catalogue apportent-t-ils des éléments qui viendraient confirmer la réalité de la « Shoah par balles » ?
Courte histoire de l’Ukraine
Afin d’y répondre, un court exposé préliminaire sur l’histoire moderne de l’Ukraine se révèle nécessaire.
Plus que beaucoup d’autres régions d’Europe, l’Ukraine a été le théâtre de nombreuses tragédies. Guerres d’invasion, guerres civiles, partages, massacres, famines, épidémies, etc, peu de fléaux engendrés directement ou non par les hommes lui ont été épargnés.
La guerre civile
Pour le passé récent (XXe siècle), rappelons qu’en novembre 1917, après la chute du Tsar, une république autonome ukrainienne fut proclamée à Kiev, avec comme dirigeants Vinnichenko et Petlioura.
Mais un mois plus tard, les bolcheviks lui opposèrent une République soviétique d’Ukraine reconnue à Kharkov. Après une courte occupation allemande décidée au traité de Brest-Litovsk (mars 1918) et qui dura jusqu’en décembre 1918, le gouvernement nationaliste de Petlioura reprit le pouvoir non seulement contre les bolcheviks, mais aussi contre les « Blancs » (c’est-à-dire les partisans de la Russie tsariste).
Une effroyable guerre civile en résulta, qui vit s’opposer l’armée blanche de Denikine et de Wrangel, l’armée soviétique de Rakovski et l’armée nationaliste de Petlioura finalement alliée aux Polonais (voir carte). Cette lutte fratricide entre trois partis fut l’occasion de nombreux massacres perpétrés de part et d’autre (voir cliché). Dans un cycle infernal de représailles, les prises et les abandons de villes étaient accompagnés de purges contre les éléments réputés hostiles. Un rapport de la Croix-Rouge internationale parle par exemple de 3 000 victimes à Kiev en 1919[1].
Tueries de masse
Après la débâcle des armées blanches, les bolcheviks organisèrent une répression sauvage. Les militaires furent les premiers touchés : les massacres d’Odessa perpétrés en mai 1920 contre des officiers blancs empêchés par les Roumains de traverser le Dniestr pour fuir à l’étranger en sont un exemple parmi tant d’autres.
D’après certaines estimations, ils auraient fait 50 000 victimes[2] Parfois, les femmes et les enfants n’étaient pas épargnés. A Tiraspol, ainsi, la garnison galicienne fut exterminée en entier :
D’Odessa vint l’ordre d’évacuer, pour cause de trahison, tous les Galiciens ; quand ils furent rassemblés à la gare de marchandises, avec femmes, enfants et bagages, on commença à les tuer à coups de mitrailleuses[3].
Lorsque des tueries avaient lieu en plein air, loin de la mer ou de cours d’eau (pratiques pour se débarrasser des cadavres), le recours aux fosses communes était fréquent. A Théodosie (Crimée), des condamnés furent contraints de creuser de telles fosses avant d’être fusillés :
On les rangeait par couche. Par-dessus les cadavres on mettait une nouvelle rangée de vivants, pour « égaliser » et cela continuait ainsi jusqu’à ce que la fosse commune fût remplie jusqu’au bord [Ibid., p. 79.].
Sans surprise, les enquêteurs de tout bord envoyés à l’époque recensèrent en Ukraine de nombreuses fosses communes renfermant des cadavres mutilés. S. P. Melgounov écrit :
Dans les documents de la commission Denikine, nous voyons passer les villes de Kharkov, de Poltava. Partout, ce sont « des cadavres aux mains coupées, aux os brisés, aux têtes arrachées, les mâchoires fracassées, les organes sexuels coupés. » Partout les fosses communes donnent des dizaines de cadavres dans cet état : à Kobel 69, dans une ville de canton 20, à Karkhov 18 hommes de 70 ans [Ibid., p. 111.].
Naturellement, chaque camp exhiba les cadavres et les fosses attribués aux autres. L’objet de cette étude n’est pas de dénoncer un coupable principal, mais de rappeler qu’à la fin de la guerre civile en Ukraine, le pays était parsemé de tombes communes renfermant les populations les plus diverses.
La grande famine de 1921-1922
Mais ce n’était pas fini. A peine arrivés au pouvoir, les bolcheviks avaient entrepris une réforme agraire très ambitieuse : la collectivisation des terres avec la création en parallèle de kolkhoz et de sovkhoz.
La première phase de cette réforme, appelée « communisme militaire » ou « communisme intégral », dura jusqu’en 1921.
Elle se solda par un gigantesque désastre alimentaire qui eut deux conséquences principales : l’apparition d’épidémies et notamment du typhus (grande épidémie de 1920-1921) et la grande famine de 1921-1922.
D’après le comte W. N. Kokovtzoff, qui a consacré un long chapitre de son livre Le bolchevisme à l’œuvre à la « politique des soviets envers les paysans », cette famine, qui toucha également l’Ukraine naguère florissante, aurait coûté la vie « à plus de 15 millions d’êtres humains »[4].
En Ukraine, des paysans affamés se révoltèrent contre les réquisitions de l’État. Envoyé par le pouvoir central soviétique, l’ex-dictateur de la Hongrie, Bela Kun, réprima les révoltes par le feu et par le fer. Le 9 août 1921, il déclara au communiste français Maurice Laporte venu en visite à Moscou :
Je ne parlemente jamais avec les révoltés. Quand j’arrivais dans un district qui avait pris les armes plutôt que d’accepter les réquisitions, je faisais encercler le village avec des mitrailleuses. Cette bonne précaution prise, nous mettions le feu aux isbas. Ainsi, tout ce qui ne voulait pas périr, brûler, s’en venait servir de cibles à nos balles. J’ai obtenu ainsi d’intéressants résultats[5].
Dans son livre-témoignage, M. Laporte écrivit que « ce système de nettoyage par le feu et la mitrailleuse » avait également été utilisé pour combattre l’épidémie de typhus qui sévissait à la même époque (Id.)
Voilà pourquoi on peut dire qu’en 1923, bien d’autres fosses communes avaient été creusées en Ukraine, qui contenait les restes de gens morts de faims, du typhus ou sous les balles lors de la répression des révoltes populaires.
La famine de 1931-1932
Ajoutons qu’en 1931-1932, une nouvelle famine ravagea la campagne ukrainienne. Accompagnée encore une fois du typhus[6], elle fit plusieurs millions de morts (certains parlent de quatre millions de morts ukrainiens sur six millions au total[7]).
Purges staliniennes
Puis vinrent les fameuses purges staliniennes survenues à partir de 1937 :
Chaque nuit de 1937 à 1941, les corps des prisonniers politiques liquidés d’une balle dans la nuque par le NKVD furent enterrés dans une forêt de pins des environs de Kyiv [Kiev]. Une zone spéciale avait été réservée et aménagée pour les y ensevelir secrètement.
Les archives de Kyiv ont récemment mis au jour un document mettant à disposition du NKVD des parcelles « à destination spéciale » dans la zone de la forêt de Darnytsa près du village de Bykivnya.
Les premières victimes tirées de la prison Loukyanivka de Kyiv y furent ensevelies à la fin des années vingt.
Les corps de plus de 100 000 victimes torturées puis assassinées dans les cellules du NKVD furent jetés dans de profondes fosses communes creusées entre les racines des pins. Des décennies plus tard, les eaux et la terre sablonneuse avaient lessivé les ossements qui furent mis au jour[8].
La forêt de Darnytsa n’est pas le seul endroit où existent des charniers du NKVD.
En 1943, à Vinnytsia, les Allemands découvrirent de nombreuses fosses communes qui contenaient les restes d’autres victimes des purges staliniennes (voir cliché). 9 442 corps furent comptés, mais d’après certains, le nombre de victimes oscille entre 11 et 12 000[9].
Ces fosses de Kiev et de Vinnytsia ont été localisées. Cependant, il en reste de très nombreuses à découvrir, un peu partout sur le territoire ukrainien.
Les juifs d’Ukraine jusqu’en 1941
Cela dit, évoquons rapidement le cas des juifs de la région. Implantés depuis longtemps dans le pays et constitués en forte minorité, un puissant parti juif existait en Ukraine à la fin de la première guerre mondiale. Dans une lettre du 16 janvier 1918 écrite depuis Odessa où il séjournait en tant qu’officier d’une mission sanitaire française, un témoin écrivit :
Tous les partis (bolcheviks, ukrainiens, juifs) descendirent dans la rue : le parti le plus nombreux devait prendre le pouvoir[10].
La mention explicite des juifs dans cette lutte pour le pouvoir confirme que cette minorité participait activement à la vie politique. Or, on sait que, pour de nombreux juifs militants, la chute du régime tsariste était perçue comme un événement positif, car elle était susceptible d’ouvrir la voie à l’émancipation totale. D’où le soutien d’une partie d’entre eux aux révolutionnaires russes, y compris aux bolcheviques.
On ne sera donc pas surpris que dans cette région où un antisémitisme traditionnel existait déjà, la guerre civile contre l’armée soviétique ait été l’occasion de nombreux pogromes perpétrés notamment par les nationalistes ukrainiens (mais aussi par les « Blancs » et, dans une moindre mesure, par les Rouges).
Pour les partisans de Simon Petlioura, les juifs dans leur ensemble étaient devenus une population hostile à combattre et sur laquelle les représailles s’exerçaient en premier lieu, même s’il s’agissait d’innocents.
Dans son ouvrage - très tendancieux et très exagéré - consacré aux pogromes des années 1918-1921, B. Lecache a montré plusieurs fosses où des juifs allaient être enterrés après avoir été assassinés[11].
Par la suite, les juifs souffrirent comme les autres populations de la disette, de la famine et des épidémies.
Ces quelques rappels permettent de conclure que, parmi les milliers de fosses communes existant en Ukraine, certaines contiennent en partie, en majorité ou même en totalité des cadavres de juifs morts dans des circonstances diverses aux alentours des années 20, sans que les « nazis » portent une quelconque responsabilité dans ces décès.
Les massacres du NKVD en juin-juillet 1941
La seconde guerre mondiale n’épargna pas l’Ukraine. Quatre jours après l’invasion allemande, sur ordre de Beria, le NKVD (la police secrète soviétique) massacra des milliers d’opposants (vrais ou faux) qui avaient été entassés dans les prisons du Régime. A Lvov, les tueries durèrent du 24 au 28 juin 1941 et firent près de 3 000 victimes.
Lorsqu’ils occupèrent la ville le 30 juin, les Allemands découvrirent l’horreur : des geôles débordant de cadavres en putréfaction, dont certains étaient horriblement mutilés[12]. Des visions semblables s’offrirent un peu partout en Ukraine, notamment dans la ville de Brzezany (Ibid., p. 75).
Les Ukrainiens se vengent sur les juifs
Par la suite, les populations ukrainiennes se vengèrent sur les juifs. Dans un article publié le 30 octobre 1999 par la Frankfurter Allgemeine Zeitung, l’historien polonais Bogdan Musial déclara :
Les gens songeaient à se venger. Les assassins s’étant enfuis, on trouva des boucs émissaires : les juifs. Et de fait, dans les organes inférieurs de l’administration soviétique, les juifs étaient représentés en très grand nombre, formant un pourcentage anormalement haut, ainsi que dans les rangs des milices qui étaient les hommes de main et les mouchards du NKVD[13].
B. Musial poursuit ainsi :
Les [assassins juifs du NKVD] les plus fortement compromis avaient cependant fui avec les troupes soviétiques. Sur place restaient cependant les membres de leur famille et de même ceux qui n’avaient eu que peu à faire ou même rien du tout avec le régime despotique soviétique. C’est sur eux que se dirigea maintenant toute la fureur et la haine de beaucoup d’Ukrainiens.
La milice ukrainienne rapidement formée rassembla les juifs de la ville entière [Lvov] et les chassa à coups redoublés vers les prisons. La, ils furent obligés de vider des fosses communes, de descendre dans les caves afin d’en retirer les victimes. Puis on en vint au pogrome. La populace saisit l’occasion pour piller les appartements et les maisons des juifs. Les juifs furent frappés, reçurent des coups de pied et furent tués. Le chiffre des victimes juives s’élève à des milliers.
Cependant, il n’y a pour ainsi dire pas d’indice selon lequel ce pogrome aurait eu lieu a l’instigation des Allemands. Les tensions entre les Ukrainiens et les juifs, de même qu’entre les Polonais et les juifs, ont atteint leur point culminant entre 1939 et 1941. Les vieux préjugés antisémites se mêlaient au traumatisme de la tyrannie soviétique jusqu’à produire un état d’esprit explosif. Les massacres soviétiques sur les prisonniers ont été plus qu’une étincelle […] .
[Dans les autres villes où des massacres avaient été perpétrés] de terribles scènes eurent lieu quand les gens cherchèrent à retrouver les membres de leur famille parmi les cadavres. Comme à Lemberg [Lvov], on en vint ensuite […] à des pogromes. En règle générale, on força les Juifs de la région à exhumer les cadavres, à les laver, à creuser les tombes et à mettre les morts dans les cercueils. Les juifs furent battus, maltraités et, finalement aussi, tués.
Des Allemands interviennent pour calmer les esprits
Je note que si certains documents accusent les Allemands d’avoir laissé libre cours aux violences, d’autres démontrent que, à Lvov notamment, la Wehrmacht reçut l’ordre de faire cesser les exactions. Interrogé après la guerre, le général Max Winkler déclara :
En réaction a ces meurtres [ceux commis par le NKVD à Lvov], la population ukrainienne commença immédiatement à tirer les Juifs hors de leurs maisons et à se livrer sur eux a des violences dans les rues.
Le commandant provisoire de la place de Lvov, le colonel Fingergerst du 4ème corps d’armée, parvint à stopper [ces excès] en donnant des ordres aux troupes allemandes et en envoyant des patrouilles spéciales dans les rues[14].
De son côté, le général Egbert Picker raconta :
J’ai également vu dans une petite cour environ 15 corps, apparemment des juifs qui avaient été tués en représailles par la population locale peu après que les Russes eurent évacué la ville.
Les Juifs furent jetés en prison par des civils locaux munis de brassards, et, en une occurrence, ils furent battus avec des gourdins.
Le général Kübler (…) me dit (…) qu’il avait ordonné que de tels actes de violence commis par la population civile contre des juifs cessent immédiatement [Id.].
Nouvelles preuves que face à une fosse commune, la prudence s’impose, même s’il est démontré que les cadavres découverts sont ceux de juifs tués dans les années 40. Rien ne prouve en effet que le massacre ait été commis par les Allemands.
La guerre des partisans
Par la suite, l’Ukraine fut le théâtre de violents combats, surtout après 1943, au moment de la contre-offensive soviétique. Dans cette lutte acharnée, les Soviétiques eurent recours aux partisans parmi lesquels figuraient des femmes et des enfants[15]. Cette guerre illégale provoqua des représailles de la part de l’occupant, avec les immanquables excès qui les accompagnent et qui touchent des innocents.
Citons par exemple le rapport allemand « Korueck 580 » qui déclarait abruptement :
Le 16 octobre 1942, des suspects en grand nombre ont été arrêtés et liquidés dans les localités de Weregnigo. Weregnigo elle-même a été brûlée. De nombreux suspects ont été tués au cours du nettoyage de la région et plusieurs villages incendiés[16].
Gageons que parmi les « suspects » liquidés figuraient de pauvres gens totalement innocents.
Dans son journal, von Hassel a écrit :
La guerre à l’Est est terrible. C’est un véritable retour à la sauvagerie. Un jeune officier […] a reçu l’ordre de fusiller 350 civils, des soi-disant partisans, parmi lesquels il y avait des femmes et des enfants qui avaient tous été parqués dans une grange. Comme il hésitait, on l’a prévenu que s’il n’exécutait pas l’ordre, il serait lui-même condamné à mort. Il a alors demandé dix minutes de réflexion, puis il a fait exécuter l’ordre à la mitrailleuse[17].
Mentionnons également le cas de la 3ème Panzerdivision qui, en réponse à un raid de partisans, attaqua le village de Bavsuki, l’incendia et fusilla la population[18].
Les victimes de ces tueries étaient souvent enterrées dans des cavités naturelles ou dans des fosses hâtivement creusées.
Conclusion
Au terme de cette étude préliminaire, la conclusion s’impose : si l’on veut démontrer qu’en Ukraine, entre 1941 et 1944, les Allemands ont massacré les juifs dans le cadre d’une « Shoah par balles », il ne suffira pas de découvrir quelques centaines de fosses communes. Car dans ce pays au passé sanglant, de très nombreux charniers existent qui sont antérieurs à 1941 et qui ne sont nullement imputables aux « nazis ».
Les fosses découvertes devront donc être soigneusement expertisées afin de prouver qu’il s’agit bien de civils juifs tués au cours de la période voulue. Ensuite, il faudra, à l’aide de documents d’archives et de témoignages soigneusement vérifiés, établir que ces juifs ont été tués par les Allemands, non dans le cadre de la lutte contre les partisans ou de représailles, mais uniquement parce qu’ils étaient juifs.
Certes, cette tâche est très ardue. Mais lorsqu’il s’agit d’accuser tout un peuple d’un massacre sans précédent dans l’histoire, il est interdit d’agir avec désinvolture. La vertu de Justice exige la plus grande prudence et la plus grande honnêteté.
Le travail du Père Desbois
La situation des juifs ukrainiens
Cela dit, examinons l’ouvrage du Père Desbois Les fusillades massives des juifs en Ukraine 1941-1944. La Shoah par balles.
Il commence par un texte de deux pages sur l’histoire des juifs en Ukraine jusqu’en 1939. Je ne m’y attarderai pas, me contentant de souligner que cet article confirme les tribulations vécues par les juifs ukrainiens dans les années 20 et 30.
L’auteur, Boris Czerny écrit en effet :
[…] la guerre civile qui avait suivi la capitulation de l’Allemagne avait entraîné la mort de 75 000 à 200 000 juifs. Toutes les forces nationales et politiques s’étaient livrées à des pogroms, en particulier l’armée blanche et les nationalistes ukrainiens de S. Petlioura mais aussi, dans une moindre mesure, les anarchistes et les bolcheviques.
[…] Au début des années 1920, la population juive soviétique se trouvait dans une situation économique catastrophique causée par la guerre civile, les pogroms et la destruction de l’assise socio-économique traditionnelle […].
Depuis 1926, la région avait perdu plus de 200 000 juifs morts de la famine qui, au début des années 1930, ravagea la campagne ukrainienne [pp. 12 col. B et 13 col. A.].
Entre 275 000 et 400 000 morts lors de guerres, de massacres et de disettes antérieurs à 1941, cela fait pas mal de fosses communes non imputables au « nazis » !
La « Shoah par balle » : aucune preuve en amont
Suit un texte de sept pages avec lequel nous entrons dans le vif du sujet.
Intitulé : « Le génocide des juifs d’Ukraine », il a été rédigé par un docteur en histoire, maître de conférences en histoire contemporaine à Paris IV-Sorbonne, Édouard Husson. L’auteur se contente d’affirmations sans preuve ; jamais il ne se réfère à un livre ou à un document quelconque. En sept pages, on ne trouve pas une seule note, pas une seule référence, pas une seule citation.
Affirmations sans preuves
Dès 33, Hitler prépare un génocide
E. Husson commence ainsi :
Durant ses premières années de pouvoir, Adolf Hitler avait tendance à calmer ses proches collaborateurs pressés d’en découdre, en Allemagne, avec les juifs. Mais le dictateur savait que la guerre serait plus propice à la « solution de la question juive » [p. 22, col. A].
Qui étaient ces « proches collaborateurs » ? E. Husson ne donne aucun nom.
Quelle preuve a-t-on qu’Hitler aurait dû les « calmer » ? E. Husson n’en donne aucune.
Et surtout, quelle preuve a-t-on que dès le début, Hitler aurait eu en tête de déchaîner la guerre et d’en profiter pour régler leur compte aux juifs ? E. Husson ne nous éclaire pas.
Je me contenterai de lui rappeler qu’en 1933, le chaos régnait en Allemagne. A cette époque, le peuple et les dirigeants avaient un seul objectif : trouver des solutions pour sauver le pays, c’est-à-dire pour redresser l’économie, résoudre la question du chômage et donner du pain au peuple.
A Nuremberg, l’antisémite Julius Streicher le rappela. Lorsque son avocat lui demanda :
Comment envisageait-on, dans les débuts du Parti, la solution de la question juive ?
il répondit clairement :
Dans les débuts du Parti, on ne parlait absolument pas de résoudre la question juive, de même qu’il n’était pas question non plus de la façon dont on pourrait abolir le Diktat de Versailles. Il faut se représenter le chaos qui régnait alors en Allemagne. Si un Adolf Hitler avait dit à ce moment-là aux membres de son parti : « En 1933, je commencerai par susciter une guerre », on l’aurait cru fou. L’Allemagne n’avait plus d’armes ; l’Armée du 100 000 hommes n’avait que quelques canons d’infanterie ; l’idée de prophétiser une guerre ne venait pas à l’esprit et parler d’une question juive, alors que l’opinion ne voyait chez les juifs qu’une différence de religion, eût été une absurdité. Par conséquent, je puis dire qu’avant 1933, il n’a jamais été question d’une solution de la question juive. Je n’ai jamais entendu Hitler en parler ; et ici même, il n’y a personne dont je puisse dire que je l’aie jamais entendu prononcer un mot sur cette question [TMI, XII, 318].
Dans les années qui suivirent l’accession au pouvoir, rien ne changea. La tâche à effectuer en Allemagne était si grande que les dirigeants allemands s’y consacrèrent entièrement. Quant aux lois raciales de 1935, elles démontrent qu’à cette époque, les nationaux-socialistes voulaient résoudre la question juive en légiférant, pas un suscitant une quelconque guerre.
Génocide préparé en secret
Immédiatement après, E. Husson déclare que durant cette période d’attente, « au cœur du régime », sous la direction de Heinrich Himmler et de Richard Heydrich :
se forgeait une « deuxième génération » de chefs nazis. Ils étaient pour la plupart juristes. Ils imaginèrent, dès le milieu des années 30, le cadre d’une « administration de combat », c’est-à-dire l’instrument d’une politique génocidaire [p. 22, col. A.].
Là encore, on aimerait non seulement des noms, mais aussi des précisions sur la façon dont cette « administration de combat » allait rendre possible une « politique génocidaire ». Mais rien ne vient. Rien. Pas même la référence à un ouvrage quelconque.
Toujours les « directives orales » d’Himmler
L’auteur précise enfin :
La mise à mort d’un million et demi de juifs d’Ukraine, entre la mi-1941 et la fin 1943 fut rendue possible par la souplesse organisationnelle des unités de tueurs. Les interventions de centre de décision berlinois étaient réduites au minimum, une fois qu’un commando de tueurs avait pleinement intégré les ordres [Id.].
A la page suivante, E. Husson évoque ces « ordres ». Va-t-il les citer et donner des références précises ? Non ! Il écrit :
Himmler se rendit en Galicie orientale, à Lvov, le 21 juillet 1941 et suggéra pour la première fois, que femmes et enfants soient tués aussi systématiquement que les hommes. Progressivement, en août et en septembre, toutes les unités (Waffen SS, Einsatzgruppen, Ordnungpolizei) passèrent au génocide systématique [p. 24, col. B]
On retrouve ici les sempiternelles directives orales d’Himmler, très pratiques pour pallier l’absence de documents. Car des documents, il n’y en a point. Pour s’en convaincre, il suffit de se reporter à l’ouvrage de R. Hilberg qui reste la source directe ou indirecte d’inspiration d’E. Husson.
A la page 251, l’auteur écrit :
D’après Ohlendorf, Himmler convoqua […] les commandants d’Einzatsgruppen pour leur donner personnellement des instructions, et les informa que l’élimination (Beseitigung) des juifs - hommes, femmes ou enfants - et des responsables communistes constituait une part importante de leur mission26. Le Standartenführer-SS Jäger, de l’Einzatskommando 3, a évoqué une réunion de quelque cinquante dirigeants SS à Berlin, où Heydrich aurait déclaré qu’en cas de guerre contre la Russie, il faudrait fusiller les juifs orientaux.
Nous devons fusiller les juifs ? (Wir sollen die Juden erschiessen ?)
demanda un membre de la Gestapo.
Bien entendu (selbstverstänlich)
aurait répondu Heydrich27 [19].
Voici maintenant les références données par R. Hilberg dans les deux notes :
26. Affidavit d’Ohlendorf, 5 novembre 1945, PS-2620. La véracité des affirmations d’Ohlendorf, ainsi que celles des autres témoignages relatifs aux ordres d’exécution des juifs donnés avant le départ, a été mise en doute par Alfred Streim, Die Behandlung sowjetischer Kriegsgefangener im « Fall Barbarosa », Heidelberg, 1941, pp. 74-93.
27. Résumé de l’interrogatoire de Karl Jäger, 15 juin 1959. Landeskriminalamt Baden-Württemberg, Sonderkommission/Zentrale Stelle, 1/3-2/59. Jäger se suicida le 22 juin 1959.
Comme d’habitude, donc, dès qu’il est question des (prétendus) ordres d’exterminer les juifs, R. Hilberg ne peut citer aucun document allemand de l’époque (voir l’article »Comment Raul Hilberg trompe ses lecteurs »).
Dans le cas présent, il doit recourir à des « aveux » contestés - il l’avoue lui-même ! - ainsi qu’au résumé d’un interrogatoire - pourquoi un résumé, que voulait-on cacher ? - d’une personne retrouvée morte une semaine après avoir parlé (on sait qu’un mort ne pourra plus contester ce qu’on lui a fait dire).
Une thèse inepte
Notons d’ailleurs que dans l’ouvrage du Père Desbois, E. Husson ne parle plus de « directives orales » d’Himmler mais d’une simple suggestion. :
Himmler […] suggéra […] que femmes et enfants soient tués aussi systématiquement que les hommes.
On se souvient qu’en 1987, l’historien Browning avait écrit :
[…] il ne fallait pas plus qu’une inclination de la tête venant de Hitler pour donner le « feu vert » indiquant que le meurtre de masse pouvait maintenant s’étendre aux juifs européens[20].
Nous sommes donc invités à croire qu’un million et demi de juifs ukrainiens ont été exterminés suite à une inclination de la tête du Führer et à une simple suggestion d’Himmler. C’est vraiment se moquer du monde !
Finalement, l’exposé d’E. Husson démontre que, tout comme la thèse de la Shoah par gaz, la thèse de la Shoah par balles ne repose sur rien en amont, absolument rien.
Les fosses prétendument découvertes
Méthodes traditionnelles d’enquête
Restent les centaines de fosses découvertes depuis six ans, me dira-t-on. Sans doute. Mais comme je l’ai expliqué plus haut, en Ukraine, une fosse en elle-même ne prouve rien. Il faut soigneusement l’expertiser.
A ce sujet, le cas des massacres de Vinnytsia est très instructif.
Après avoir recueilli les témoignages d’habitants du lieu, les Allemands commencèrent à creuser pour découvrir les charniers. Une fois les premiers corps mis au jour, des médecins ukrainiens les examinèrent.
Quand il se révéla que l’affaire était sérieuse, le professeur Schräder, de l’Université de Halle (Allemagne), fut nommé président d’une Commission médicale. C’était le 15 juin 1943.
Lui et son assistant le docteur Kamerer reçurent l’aide des médecins ukrainiens de Vinnytsia, lorsque ces derniers avaient du temps libre.
Ces spécialistes examinèrent 95 fosses communes, autopsièrent un grand nombre de corps et récupérèrent de menus objets découverts lors des fouilles.
1 670 corps furent ainsi examinés en détail par les médecins. Par la suite, le professeur Schräder publia un rapport intitulé: « Rapport médico-légal sur les meurtres collectifs de Vinnytsia ».
On lisait :
1. Le nombre de tombes trouvées dans le jardin appartenant au NKVD, qui ont été ouvertes, s’élève à trente huit. Dans une d’entre elles, en plus des vêtements, il n’y avait que dix-huit cadavres ; dans la seconde soixante-quatorze ; dans les autres, de cent à cent trente. Dans deux d’entre elles, on trouva jusqu’à deux cent cinquante et deux cent quatre-vingt cadavres. Dans le cimetière, près de l’hôpital Pirogov, on découvrit quarante deux tombes. Tenant compte de la proximité de l’hôpital, toutes ces tombes ne furent pas ouvertes complètement, mais plusieurs corps furent exhumés de chacune, à toutes fins d’examen. Dans le parc national, parmi les arbres, on trouva quatorze fosses et dix dans l’autre partie du parc ; quarante corps furent retirés des quatorze tombes pour être examinés.
2. L’examen détaillé de mille six cent soixante dix corps fournit les raisons exactes de la mort. Tous les cadavres portaient à la nuque les traces d’un coup de feu qui avait paralysé les vertèbres du cou ou l’action du cerveau. Dans presque tous les cas on remarqua deux, trois ou même quatre blessures. Ceci ne peut s’expliquer que par l’emploi du pistolet à petit calibre et de balles de plomb. L’arme était si petite et si légère qu’on devait tirer plusieurs fois pour tuer un être humain.
Il est remarquable que, dans tous les cas, on observa les traces d’une balle tirée sur la victime, mais aucune trace de sa sortie. Les exemples où la balle traversa la tête sont très rares. Dans soixante cas environ, en plus des blessures de balles, se trouvaient des crânes écrasés. Cela prouve que les victimes avaient été tuées avec une arme lourde, crosse de fusil ou matraque, alors qu’elles vivaient encore après les coups de feu reçus.
3. Toutes les victimes avaient les mains liées derrière le dos. Une victime avait un bras sans poignet, mais cela n’empêcha que ce bras était également attaché avec l’autre main derrière le dos. Trois jeunes femmes d’environ trente à quarante ans n’étaient pas attachées, mais elles aussi avaient des traces de balle dans la nuque. Elles étaient jetées dans la fosse toutes nues. Une femme d’environ trente ans, nue elle aussi, avait les bras liés derrière le dos. Les femmes d’âge moyen, au nombre d’environ quinze, étaient, comme les hommes, vêtues.
4. Les âges des victimes examinées :
a) le verger
de 20 à 30 ans, 274 ;
de 30 à 40 ans, 3 508 ;
de 40 à 50 ans et plus âgées, 827 ;
b) le cimetière
de 20 à 30 ans, 294 ;
de 30 à 40 ans, 1 436 ;
de 40 à 50 et plus âgées, 451 ;
c) le parc national
de 20 à 30 ans, 58 ;
de 30 à 40 ans, 1 038 ;
de 40 à 50 et plus âgées, 88.5. Les fosses communes du parc national et du cimetière, une fois ouvertes et examinées en partie, révélèrent les mêmes faits que celles du verger. Les cadavres avaient les mains liées derrière le dos, deux ou trois blessures à la tête, causées par la même arme aux balles de plomb.
6. Après avoir compté les corps dans les tombes ouvertes, les chiffres minima sont :
a) le verger, 5 644 (dont 33 femmes) ;
b) le cimetière, 2 405 (dont 85 femmes) ;
c) le parc national, 1 393 (dont 31 femmes) ;
Ensemble 9 442 victimes.
[Le nombre total de cadavres dans les trois sites de Vinnytsia s’élève à 11.000-12.000.]7. La date des crimes.
Les cadavres furent découverts à divers stades de décomposition. Grâce aux deux mètres d’argile qui empêchaient l’eau de pénétrer, et aux quelques vêtements que portaient les cadavres, la plupart des corps avaient commencé à se momifier. Dans la plupart des crânes examinés, on remarqua une calcification du cerveau. Ces conditions, d’après l’examen des experts médico-légaux, certifient que la mort était survenue cinq ou six ans auparavant, en d’autres termes, que les crimes avaient eu lieu entre 1937 et 1939. […]
Les 13 et 14 juillet 1943, une commission internationale d’experts fut formée. Elle était composée de médecins légistes de pays alliés, occupés et neutres : les docteurs Seonon (Gent, Belgique), Mychajlow (Sofia, Bulgarie), Pesonen (Helsinki, Finlande), Cazzaniga (Milan, Italie), Jurak (Zagreg, Croatie), de Poorten (Amsterdam, Hollande), Birkle (Bucarest, Roumanie), Häggqvist (Stockholm, Suède), Kresek (Bratislava, Slovaquie), Orosz (Budapest, Hongrie) et Duvoir (Paris, France), préalablement sollicitée par les Allemands pour examiner les corps.
Elle rendit un rapport dans lequel on lisait :
Les membres de la Commission ont inspecté tous les endroits où les tombes ont été découvertes. La plupart des tombes avaient même forme, même étendue et même profondeur. Dix d’entre elles étaient plus vastes et plus profondes que le reste. Dans toutes les tombes examinées, les cadavres étaient couchés n’importe comment. Les membres de la Commission eux-mêmes ont fait les autopsies de 24 cadavres examinés par les experts médico-légaux. On procéda à l’autopsie de tous les corps trouvés à l’emplacement n°1 ainsi que d’un cadavre provenant de l’emplacement n°3 (parc national).
Tous les corps masculins étaient habillés et avaient les mains liées derrière le dos. Trois corps de femmes étaient nus, les mains n’étant pas liées (tombes 24-26).
Tous les corps avaient des blessures, principalement à la nuque, causées par l’emploi d’un pistolet de petit calibre : 5,6 millimètres. Toutes les balles étaient en plomb. Il a été prouvé que dans la plupart des cas, elles ont été tirées à bout portant. Généralement les balles étaient restées dans la tête. Sur la plupart des victimes, il y avait deux ou même trois blessures distinctes.
En plus des blessures à la tête, causées par des armes lourdes et épaisses, quelques victimes avaient la mâchoire inférieure fracassée, quelques-unes le crâne écrasé etc. Dans un cas, le crâne avait été écrasé par plusieurs balles tirées dans la nuque. Dans la majorité des cas, la mort avait été causée par le coup de feu. Les personnes assassinées appartenaient à la classe ouvrière ou paysanne, et étaient d’âge moyen.
Les buissons épais, qui avaient poussé sur quelques tombes, la dureté du sol où elles étaient creusées, et surtout l’aspect des cadavres et leur état de décomposition, indiquent que ces gens avaient été enterrés cinq ans auparavant. Et ceci fut confirmé par la population locale et spécialement par les parents des morts et les fonctionnaires des bureaux locaux.Remarques générales : les membres soussignés de la Commission examinèrent soixante-six tombes, sur le territoire de la ville de Vinnytsia. Tous les cadavres portaient des blessures d’arme à feu, à la nuque, sauf un qui reçut le coup de face à la tempe. On découvrit beaucoup de victimes tuées sur le coup par l’emploi d’objets lourds, telles que des barres de fer. A la suite des témoignages des parents et des témoins, des documents trouvés dans les vêtements et de l’état des cadavres, il fut établi que les crimes furent commis en 1938.
Dr. Soenon, Gent, Belgique.
Dr. Mychajlow, Sofia, Bulgarie.
Dr. Pesonen, Helsinki,, Finlande.
Dr. Duvoir, Paris, France.
Dr. Cazzaniga, Milan, Italie.
Dr. Jurak, Zagreb, Croatie.
Dr. de Poorten, Amsterdam, Hollande.
Dr. Birkle, Bucarest, Roumanie.
Dr. Häggqvist, Stockholm, Suède.
Dr. Kresek, Bratislava, Slovaquie.
Dr. Orosz, Budapest, Hongrie.
Bien que moins connu que Katyn, le cas de Vinnytsia illustre les méthodes traditionnelles d’enquête utilisées lorsque des charniers sont découverts.
En voici d’autres exemples, plus récents :
Le cas Steeve Fossett
Le 3 septembre 2007, le milliardaire Steve Fossett disparut lors d’un vol en solitaire dans le désert du Nevada. Malgré les moyens mis en œuvre, treize mois furent nécessaires pour retrouver la carcasse de son avion (un Bellanca 8KCAB). Non loin, des ossements, une paire de chaussures, des cartes de crédit et le permis de conduire délivré par l’État de l’Illinois à Steve Fossett furent découverts.
De façon évidente, il s’agissait des restes du milliardaire. Malgré cela, les os furent analysés pour savoir s’il s’agissait vraiment de restes humains et, dans l’affirmative, en relever l’ADN à des fins de comparaison[21].
Les squelettes de la catacombe Saint-Pierre-et-Marcellin
Si la plus grande prudence est de mise lorsqu’il s’agit de restes humains découverts dans le cadre d’une disparition récente, dont de nombreux détails sont connus, elle s’impose davantage lorsque les ossements sont anciens et proviennent d’anonymes dont on ignore, a priori, les circonstances de la mort.
A ce sujet, l’affaire des milliers de squelettes découverts en 2003 à Rome, dans la catacombe des Saints-Pierre-et-Marcellin, se révèle très instructive.
Suite à la rupture d’une canalisation d’eau dans ladite catacombe, la Commission pontificale de l’archéologie sacrée entreprit des travaux. Ceux-ci amenèrent la découverte de six petites cavités inconnues jusque-là, selon toute vraisemblance, des d’anciennes citernes d’eau. En les fouillant, les archéologues eurent la surprise de mettre au jour 3 à 4 000 squelettes.
Or, la tradition veut que dans cette catacombe soient enterrées plus de 20 000 personnes, pour l’essentiel des martyrs des persécutions du règne de l’empereur Dioclétien (284-305). La présence de deux fresques du IVème siècle montrant des visages dont certains étaient auréolés paraissait confirmer la thèse du dépôt de martyrs chrétiens inconnu jusqu’à ce jour.
Le dossier aurait donc pu être clos, les six cavités rebouchées et les squelettes déclarés ceux de martyrs. Mais le Vatican voulait des preuves certaines. Aussi fit-il appel à l’équipe d’Henri Ducay, expert en archéothanatologie (terme qu’il a créé lui-même en 1998), une discipline qui fait se rencontrer archéologues de formation historienne et anthropologues biologistes. L’objectif était d’analyser les squelettes sous la loupe de l’historien et du biologiste afin d’en retirer le maximum d’informations.
Les trois menus objets découverts près des ossements (une bague, une épingle à cheveux et une boucle d’oreille) ne fournirent aucun détail précis, chronologique ou autre.
Mais la disposition des squelettes se révéla porteuse d’informations : les corps étaient en rang et en connexion anatomique, preuve qu’ils n’avaient pas été jetés les uns sur les autres mais disposés avec respect. Ainsi s’évanouissait l’hypothèse d’un ossuaire rassemblant des squelettes tirés de leurs tombes individuelles.
Leur nombre, cependant, était très élevé si on le comparait à l’espace restreint dans lequel ils reposaient. Il fallait en déduire que plusieurs vagues d’inhumation avaient eu lieu, ce qui laissait aux corps précédents le temps de son décomposer et, ainsi, de libérer du volume.
Autre fait important : sur 500 squelettes étudiés, aucun ne présentait de lésions osseuses. Sauf à imaginer que ces gens aient tous été égorgés, ce constat anéantissait l’hypothèse des martyrs.
Sachant en outre que les dépôts avaient été très rapprochés et que les cavités découvertes étaient d’anciennes citernes d’eau, sans doute fallait-il privilégier la piste d’une ou plusieurs épidémies durant lesquelles des corps auraient été inhumés dans l’urgence et dans des espaces déjà creusés.
La présence d’une poudre blanche comparable à de la chaux renforçait cette piste. Il apparut cependant qu’il s’agissait de plâtre, comme si certains cadavres avaient porté un masque mortuaire. En outre, des fils d’or pur et de nombreuses paillettes d’ambre de la Baltique (un matériau très cher) furent retrouvés parmi les ossements, attestant une origine sociale assez élevée ainsi qu’un rite funéraire exotique (une sorte de momification rudimentaire).
Peut-être s’agissait-il d’une riche communauté étrangère établie à Rome.
Peu après, un autre élément réfuta lui aussi l’hypothèse des martyrs : la datation au carbone 14 fournit une estimation comprise entre 28 et 132 de notre ère, c’est-à-dire une époque bien antérieure à l’occupation chrétienne de la catacombe (250 après J.-C. au plus tôt) et aux persécutions sous Dioclétien. Certes, un seul squelette avait été daté, mais la très grande homogénéité des pratiques funéraires attestait des enterrements collectifs rapprochés dans le temps (quelques décennies tout au plus).
Les « archéothanatologistes » privilégient donc la thèse « d’une population affectée par une succession de crises épidémiques espacées dans le temps avec persistance d’un lieu d’inhumation précis pour une catégorie sociale particulière de la population romaine »[22]. Des recherches du bacille de la peste n’ont rien donné, mais d’autres candidats existent : typhus, variole, etc.
Cette affaire assez anecdotique démontre que face à des restes humains, la prudence est de mise, même si, a priori, les circonstances de la mort paraissent faciles à déterminer.
Dans le cas de la catacombe des Saints-Pierre-et-Marcellin, tout semblait au départ étayer l’hypothèse des martyrs (le lieu proprement dit, la tradition qui s’y rapporte et les fresques auréolées). Mais de l’expertise scientifique se dégagea une histoire totalement différente, bien plus prosaïque, bien plus banale.
Un double meurtre décrit des siècles plus tard
La force des expertises est telle que même sans aucun renseignement au départ, il est parfois possible de découvrir la provenance de certains restes humains et, en cas de mort violente, de déterminer les causes du décès. L’affaire des ossements découverts 1987 à Echallon (Ain, France) le démontre amplement.
Le 30 janvier 1987, suite à une désobstruction menée par le Spéléo-Club d’Oyonnax, trois groupements d’os humains furent découverts, dont deux crânes (l’un intact, l’autre très fragmenté). Les cassures recouvertes de calcite témoignaient de leur ancienneté. Des traces sur les os démontraient qu’un animal carnivore avait déplacé les corps, les introduisant dans la cavité.
L’étude très attentive des crânes - en particulier l’état des sutures : soudées ou non - démontra qu’ils provenaient d’un sujet masculin et d’un sujet féminin âgés respectivement d’environ 20 ans et de 16 à 18 ans. Mais surtout, le calcul des distances de formes avec les grandes séries typologiques de référence (Mosans, Savoyards, Burgondes, Nordiques, Atlanto-Méditerranéens, Ibéro-Insulaires) et des séries limitrophes (Médiévaux Genevois XIIIe-XVe, Ardéchois XIVe-XVIIe, Choulans, Carolingiens Dijon, Gallo-Romains bourguignons) permit de conclure qu’il s’agissait probablement de deux membres des populations de l’Ouest, Bourgogne pour le sujet masculin (avec une préférence pour la période gallo-romaine), Franche-Comté ou Bourgogne pour le sujet féminin.
Enfin, l’étude précise des lésions crâniennes et mandibulaires avec comparaison des coups observés sur d’autres crânes prouva que la jeune femme avait été tuée par surprise, d’un coup d’épée plutôt courte (de type scramassax) que longue (framée).
Le coup avait été porté à droite, de haut en bas, obliquement de gauche à droite, par un agresseur qui se trouvait en arrière de la tête de la victime. La thèse de l’agression mortelle était appuyée par les lésions visibles sur les quelques phalanges retrouvées, lésions prouvant qu’un doigt avait été coupé net, peut-être lors d’un geste d’autodéfense (protection du visage par la main ?).
Enfin, les lésions dentaires maxillaires (fracture et luxation) témoignaient, avec la section mandibulaire, du passage d’un objet tranchant transversalement au visage au niveau de la bouche, ce qui pouvait évoquer une tentative de décapitation lorsque la victime avait déjà la tête au sol.
Les auteurs concluaient :
Il est très vraisemblable que les deux cadavres se sont décomposés en surface dans la cavité et n’ont pas été introduits par le ruissellement. Leur emplacement initial reste indéterminé en raison des perturbations dues à un animal.
Concernant l’âge des ossements, la seule certitude est qu’ils ne sont pas préhistoriques comme le laisse entrevoir leur état de conservation et les traces d’outils métalliques.
L’étude anthropologique quant à elle, a montré que les deux individus retrouvés dans cette diaclase étaient un homme et une femme âgés de moins de vingt ans qui présentent les caractères morphologiques de population autochtones (type Alpin) et quelques aspects Nordico-Lorrains probablement médiévaux et qui ont été massacrés comme l’attestent les blessures par épée de la jeune femme (scramassax ?)[23].
L’étude que je viens de résumer et dont je possède le texte intégral compte pas moins de 23 pages (format A4). Bien que certains passages très techniques soient peu compréhensibles, sa lecture reste passionnante car elle démontre toute la puissance des expertises scientifiques.
Quand on compare la méticulosité des recherches faites à Echallon et dans la catacombe des Saints-Pierre-et-Marcellin avec les méthodes utilisées par les chantres de la « Shoah par balles », le Père Desbois apparaît comme un « sacré farceur ».
Aucune fouille
Dans l’ouvrage du Père Desbois, je pensais trouver ce genre d’expertises, avec notamment des photos de cadavres exhumés et tous les rapports médico-légaux indispensables. Quelle ne fut pas ma surprise de lire à la page 36, où les méthodes d’investigation étaient expliquées :
Sur les indications des témoins, l’emplacement de la fosse est repéré, ses coordonnées GPS sont notées. Les douilles allemandes, qui sont toutes datées, ou toute autre preuve balistique sont recueillies avant que l’emplacement de la fosse ne soit camouflé, afin d’éviter que des pilleurs de tombes ne la profanent [p. 36, col. C].
On en déduisait que non seulement le Père Desbois et ses comparses n’avaient fait procéder à aucune expertise, mais aussi qu’ils n’avaient même pas pris soin de creuser pour vérifier matériellement la présence de cadavres aux endroits indiqués par les témoins.
Voilà d’ailleurs pourquoi - à une exception près sur laquelle je reviendrai - les dix photos de fosses publiées dans l’ouvrage montraient des paysages banals, sans aucun trou au fond duquel on aurait pu apercevoir des ossements.
Le cliché légendé « fosse n° 121 » montre un chemin près d’une ville (pp. 51 et 93), dans les pages qui suivent, on voit défiler en guise de « fosse » : une clairière (« fosse n° 2 », p. 81), des oies dans un champ près d’un ruisseau (« fosse n° 140 », p. 54), un verger (« fosse 67 B », p. 74), une autre clairière jonchée de feuilles mortes (« fosse n° 163 », p. 86), un autre champ avec une dépression (« fosse n° 139 », p. 99).
Nous sommes vraiment en pleine farce !
Témoignages « concordants » ?
On me répondra que le Père Desbois et ceux qui l’accompagnent admettent l’existence d’une fosse quand trois témoins en parlent indépendamment les uns des autres :
C’est à partir de trois témoignages concordants recueillis indépendamment que Yahad-In Unum admet la localisation d’un site d’exécution inconnu jusqu’ici [p. 36, col. C].
Comment le Père Desbois trouve ses « témoins »
Cette précision pourrait avoir un certain poids si les « témoins » étaient recherchés discrètement et interrogés simplement, c’est-à-dire sans appareil audio ou vidéo. C’est ainsi que j’ai procédé à Oradour-sur-Glane ; j’ai d’abord identifié des témoins en consultant des documents d’époque (ouvrages, articles de journaux) et je les ai ensuite contactés un par un, personnellement.
Mais le Père Desbois adopte une autre méthode :
Le Père Desbois et une équipe d’experts parcourent régulièrement les régions d’Ukraine dans le but d’identifier les témoins du génocide encore vivants aujourd’hui. Lorsque l’équipe arrive dans un village, les personnes âgées sont informées par le Père Desbois du but de sa visite, et sont sollicitées pour témoigner. Les prêtres locaux peuvent aider en lançant des appels lors des messes.
Dans les villages de l’est de l’Ukraine, où il n’y a pas ou peu d’église, c’est le magasin principal ou l’école qui sert de lieu de réunion à la communauté […]. Une interview, menée par le Père Desbois, est enregistrée sur un support vidéo digital pendant que le reste de l’équipe recherche d’autres témoins [p. 36, col. B].
On en déduit que, loin de procéder discrètement, l’équipe du Père Desbois débarque avec ses appareils (micros, caméras, etc) et lance des appels à témoin en révélant le but de sa visite. C’est très imprudent, car ce genre d’appel entraîne l’apparition d’individus prêts à dire ce que l’on attend d’eux pour jouer un rôle, parler devant une caméra et, ainsi, acquérir une importance qu’ils n’ont jamais eue.
Connaître la psychologie humaine
Il y a quelques années, lors de mes trajets nocturnes en voiture, j’écoutais la station de radio française « Rires et chansons ». Une séquence appelait plus particulièrement mon attention.
Intitulée « La rumeur », son principe était le suivant : un complice pénétrait dans un bar et racontait aux gens présents un événement sensationnel qui s’était prétendument passé non loin du lieu et qui impliquait une personne connue dans le monde du spectacle, du sport ou de la politique. Puis il partait.
Naturellement son récit était faux de bout en bout. Peu après, une fausse équipe de journalistes arrivait dans le bar pour recueillir les témoignages concernant l’événement. Trop heureux d’acquérir de l’importance, les gens rapportaient, comme s’ils l’avaient eux-mêmes vu, ce que le premier complice leur avait dit.
Et plus l’entretien durait, plus ils inventaient de nouveaux détails pour répondre aux prétendus journalistes qui les interrogeaient.
Je me souviens notamment d’une séquence où la fausse nouvelle concernait le joueur de foot Zinédine Zidane. Le complice avait raconté sans plus de précisions que le matin, le joueur international avait été arrêté par la police dans un immeuble voisin pour usage de stupéfiants. Interrogé peu après, un client du bar confirma la nouvelle comme s’il l’avait vue. Questionné sur l’expression de Z. Zidane au moment d’être emmené, notre lascar donna des précisions totalement fantaisistes.
Dans l’ouvrage du Père Desbois, trois clichés montrent l’interview filmée de trois femmes (pp. 34 et 35). Point n’est besoin d’être grand psychologue pour savoir que dans ces conditions, les « témoins » sont prêts à en rajouter et à dire ce que l’on attend d’eux pour que leur récit soit considéré comme important.
Un cas flagrant
Un cas flagrant peut être d’ailleurs trouvé dans l’un des deux DVD vendus avec le livre et qui contiennent les enregistrements intégraux de dix témoignages recueillis par le Père Desbois entre avril 2004 et janvier 2007.
Pour bien le comprendre, une petite explication préliminaire est nécessaire. On savait depuis longtemps que, dans les « camps d’extermination », les Allemands auraient prélevé l’or dentaire sur les cadavres de gazés. Grâce à certains « témoins » rencontrés par le Père Desbois, on sait maintenant qu’en Ukraine, lors de la « Shoah par balles », les Allemands faisaient pis : ils arrachaient les dents en or aux juifs avant même de les exécuter.
Le premier « témoin » à le raconter fut, semble-t-il, une certaine Anna Filipivna Tchouprina. Voici ce que l’on peut entendre dans l’interrogatoire mené par le Père Desbois :
LE TÉMOIN. - Nos policiers les battaient [les juifs], leur arrachaient leurs dents en or [voir cliché], les boucles d’oreilles. Ils n’avaient plus rien. Les policiers prenaient leurs dents, leurs boucles d’oreilles. Ils n’avaient plus rien.
PATRICK DESBOIS. - Les boucles d’oreilles et les dents, on leur arrachait lorsqu’ils étaient encore vivants ?
LE TÉMOIN. - Oui. Ils les enfermaient dans une baraque et leur faisaient cela.
LE TRADUCTEUR. - Alors qu’ils étaient vivants ? [Cette question, posée en ukrainien, n’est pas traduite, mais on la comprend.]
LE TÉMOIN. - Oui, oui.
C’était le 20 juillet 2007. Cinq jours plus tard, notre prêtre enquêteur rencontra deux autres « témoins » : Lena Volkova et Andreï Velkov. Ils prétendaient avoir vu, en 1943 ou 1944, le massacre d’environ 300 juifs par des colons allemands.
Les assassins présumés auraient agi ainsi : ils dépouillaient les juifs de leurs valeurs (argent, bijoux) puis les tuaient par petits groupes en les fusillant sur le bord d’une fosse ; après chaque exécution, les victimes étaient recouvertes de gasoil et de tournesols.
Une fois le massacre terminé, le feu aurait été mis à la fosse, puis un bulldozer serait passé pour la combler.
Au cours de l’interrogatoire, le Père Desbois posa la question suivante : « Et, euh, ils prenaient aussi les dents aux gens, les dents en or, ils arrachaient les dents ? » Voici ce que l’on put alors entendre :
A. VELKOV. - Oui, les couronnes.
P. DESBOIS. - Quand ils étaient vivants ?
A. VELKOV. - Non, Ah, si ! Si.
P. DESBOIS. - Ils arrachaient ça comment, avec des pinces ?
A. VELKOV. - Je ne l’ai pas vu.
Reprenons ce dialogue en l’analysant phrase par phrase :
1°) Lorsque le « témoin » répond : « Oui, les couronnes », cette seule réponse est déjà suspecte, car s’il a bien évoqué le dépouillement des juifs, il n’a pas parlé de dents arrachées. Or, ce n’est pas une chose que l’on oublie quand on l’a vue. Tout porte donc à croire qu’en posant sa question, le prêtre a soufflé une idée que son interlocuteur s’est empressé de reprendre pour pimenter son récit.
2°) Ayant encore en mémoire les allégations proférées cinq jours avant par A. Tchouprina, le Père Desbois demande alors si les dents étaient arrachées aux gens « quand ils étaient vivants » Sans réfléchir, A. Velkov répond par la négative. Pourquoi ? Parce ce que cette réponse est de bon sens : quand on arrache de force des dents, mieux vaut le faire à des morts qu’à des vivants. Mais dans ce cas précis, elle s’accorde mal avec la version des faits, puisqu’il faudrait alors croire que les colons effectuaient leur sinistre besogne de dentistes improvisés dans la fosse, entre les corps tombés en désordre et en pataugeant dans le gasoil. Cette objection insurmontable étant apparue au « témoin », celui-ci il se ravise et lance brusquement : « Ah, si ! Si ». Ce revirement subit est la preuve du faux témoignage improvisé.
3°) L’aveu - implicite - du mensonge tombe d’ailleurs immédiatement après. Des précisions lui ayant été demandées sur le mode d’extraction, le « témoin » lâche : « Je ne l’ai pas vu ». Comprenez : j’ai tout inventé !
A ceux qui contesteront mon analyse, je répondrai que dans son ouvrage, le Père Desbois n’a pas hésité à falsifier l’interrogatoire pour ne pas éveiller les soupçons. Voici ce que l’on peut lire à la page 69, où une courte partie de cet interrogatoire est reproduite :
P.D[esbois] : Est-ce qu’ils leur arrachaient aussi leurs dents en or ?
A. V[elkov]. : Oui.
P.D. : Le faisaient-ils lorsqu’ils étaient vivants ?
A.V. : Oui.
C’est clair : le Père Desbois a tronqué le dialogue pour cacher aux lecteurs les réponses contradictoires du lascar et son aveu final selon lequel il n’avait rien vu. A. Velkov est donc un exemple flagrant de « témoin » qui ment pour raconter ce que l’on attend de lui.
Ce genre d’individu est très répandu. Et quand, dans un village, l’un d’entre eux est interrogé, d’autres, qui veulent également connaître leurs trente minutes de gloire, surgissent immanquablement en racontant à peu près les mêmes choses, puisqu’ils auront soit entendu le premier « témoin », soit appris la teneur de son récit, soit eu le temps de se concerter entre eux.
Voilà pourquoi l’invocation par le Père Desbois de « témoignages concordants recueillis indépendamment » n’a guère de valeur. Pour qu’elle ait pu en avoir, il aurait fallu adopter d’autres méthodes d’investigation.
Le cas des douilles recouvertes
N’ayant mené aucune fouille sérieuse aux emplacements indiqués par ses « témoins », le Père Desbois tente de nous impressionner en attachant une très grande importance aux douilles et aux balles allemandes retrouvées lors des investigations.
Le raisonnement du Père Desbois
Le cliché n° 9 à la page 35 montre une personne munie d’un détecteur de métal. La légende porte :
On utilise un détecteur de métal pour repérer précisément l’emplacement de douilles et donc celui des fosses.
Une page plus loin, on lit :
La présence de douilles allemandes autour des fosses communes est une preuve importante que l’exécution a été perpétrée par les unités mobiles nazies [p. 36, col. C].
Le raisonnement est donc le suivant : si plusieurs « témoins » révèlent la présence d’une fosse, la découverte de douille dans le secteur confirme son existence et son emplacement exact. Et puisqu’il s’agit de douilles allemandes, c’est la preuve que l’exécution massive de juifs a été perpétrée par les « unités mobiles nazies ».
Trouvailles banales
Je répondrai tout d’abord que dans une région où des combats acharnés se sont déroulés, la découverte de douilles est parfaitement normale. J’ai passé toute ma jeunesse en Normandie, à Caumont-l’Éventé, où de violents combats eurent lieu en juin-juillet 1944.
Pendant des années, j’ai parcouru les champs et les chemins avec un détecteur de métal. J’ai trouvé tant et tant de douilles que rapidement, j’ai choisi de les laisser sur place. Je ne prenais que les objets plus intéressants : chargeurs pleins, balles traçantes ou explosives, grenades, gros éclats, pièces d’armes, couverts, etc.
Des balles utilisées dans les deux camps
Je préciserai ensuite qu’avant 1939, l’Allemagne vendit à l’étranger, et plus particulièrement aux pays de l’Est, de grandes quantités d’armes et de munitions. En 1940, une grande partie de ces livraisons fut saisie par les Soviétiques.
On se rappelle qu’à Katyn, les assassins avaient utilisé des cartouches du calibre 7,65 mm portant la marque Geco et provenant de la fabrique Gustav Genschow à Durlach. Cette nouvelle embarrassa Hermann Göring, mais il fut rapidement établi qu’avant 1939, la firme Genschow avait vendu d’importantes quantités de munitions de ce calibre à la Pologne et aux Pays baltes[24].
On en déduit que la découverte de douilles allemandes en Ukraine n’est pas la preuve que quelque mètres au-dessous gisent des juifs qui auraient été tués par les « unités mobiles nazies » dans le cadre d’une « Shoah par balles ». C’est tout au plus un indice à confirmer par des fouilles sérieuses.
Aucun indice à tirer
J’ajoute que dans son ouvrage, l’équipe du Père Desbois écrit tout d’abord que les douilles allemandes « sont toutes datées » (p. 36, col. C), laissant ainsi entendre qu’elles permettraient de nous renseigner sur la date probable de leur utilisation. Mais celles qu’on nous montre, et qui proviendraient de Khvativ (région de Lvov), sont si abîmées que leur année de fabrication est indéterminée.
Je souligne enfin que la majeure partie de ces douilles sont éclatées, déchirées, comme si elles avaient explosé après avoir été soumises à une forte source de chaleur. Tout porte à croire qu’elles ne proviennent pas de balles ayant été tirées, donc qu’elles n’ont pas pu servir dans le cadre d’une exécution.
Mais toutes ces considérations ne semblent même pas avoir effleuré l’esprit du Père Desbois et de ses collaborateurs. Pour eux, aucun doute n’est permis : douilles allemandes = fosses où gisent des juifs victimes de la « Shoah par balles ».
Le cas des objets découverts
L’équipe du Père Desbois écrit également :
A côté de ces preuves [les douilles allemandes] l’équipe a recueilli quelques objets personnels appartenant aux victimes : lunettes, jeux d’enfants, bijoux, qui ont pu échapper à la convoitise des tueurs [p. 36, col. C].
Photos d’objets banals
Nous aurions aimé voir ces jeux d’enfants et ces bijoux, mais en guise d’illustration, on nous montre uniquement une clé rouillée, une cuillère oxydée, une bobine de fil et les restes d’une paire de lunettes. La légende porte :
Objets appartenant aux victimes trouvés dans la fosse de Luhygny, région de Zhitomir, Ukraine [p. 105].
Sachant qu’excepté à Busk, aucune fosse n’a été ouverte ni fouillée, je suppose que ces objets ont été découverts tout près de la surface grâce au détecteur de métal utilisé lors de la recherche de douilles.
De tels objets, j’en ai également trouvé beaucoup en Normandie, lors de mes fouilles d’adolescent, dans des endroits où aucun massacre n’a jamais eu lieu. Ils font partie de ces choses que l’on perd ou que l’on jette un peu n’importe où. Rien, donc, ne vient prouver qu’ils auraient appartenu à des victimes qui reposeraient quelques mètres plus bas. Et même si c’était le cas, même si l’on retrouvait des ossements un peu plus profondément enfouis, ces menus objets, très banals, n’apporteraient aucun renseignement sur l’origine ethnique des victimes.
Esbroufe
Sous la photo de ces objets est certes publié le cliché d’un rouleau de Thora brûlé. Mais cette fois, la légende ne mentionne aucune fosse. Elle porte uniquement : « Provenance Ukraine ».
C’est très vague, cela laisse penser que ce rouleau n’a pas été trouvé sur le lieu d’une (prétendue) fosse. Son état est d’ailleurs peu compatible avec la thèse selon laquelle il serait resté soixante ans sous terre. Visiblement, il a été ajouté là pour impressionner et parce qu’il fallait bien montrer un objet indiscutablement juif. La ficelle est toutefois un peu grosse.
Valeur des témoignages
Mais j’entends déjà la réponse que les naïfs nous feront :
Oseriez-vous prétendre que tous les témoins interrogés par le Père Desbois ont menti, qu’ils ont tout inventé ?
N’ayant pas eu accès à tous les enregistrements, il est impossible de répondre à la question. Mais je souligne ce qui suit : dans les deux DVD vendus avec le livre, le Père Desbois présente dix enregistrements intégraux.
On lit :
Les témoignages présentés dans leur intégralité dans ces DVD sont parmi ceux qui sont les plus explicites sur le déroulement complet des exécutions en Ukraine. Ils émanent de personnes ayant été réquisitionnées, de rescapés, ou de témoins directs [p. 114].
De façon évidente, le prêtre et son équipe ont sélectionné les meilleurs. Or, que valent-ils ? Nous avons déjà vu qu’A. Velkov était un menteur évident. La plupart des autres ne sont guère meilleurs.
Pas toujours témoins oculaires
Dans un premier temps, je note que les « témoins » ne se contentent pas de rapporter ce qu’ils ont (ou auraient) vu. Diverses expressions entendues sont très révélatrices :
Témoignage d’Anna Dychkant :
Moi, je n’y étais pas, on me l’a raconté
Témoignage d’Anna Dychkant :
Témoignage de Galina Babikh :
Ma sœur m’a raconté tout ça.
Témoignage de Samuel Arabski :
Ces expressions suffisent à éveiller la méfiance.
Des témoins à la mémoire exceptionnelle
Je souligne ensuite que la mémoire des « témoins » est étonnamment fidèle 60 ans après.
Adolf Wislowski se souvient par exemple qu’à l’endroit des massacres, il y avait « 59 fosses » ;
Anna Tchoupira que lors des exécutions, les Allemands étaient « Environ 13 » ;
Samuel Arabski que les juifs étaient gardés par « neuf policiers ukrainiens » ;
Feodor Ilyuk que le tireur « utilisait cinq chargeurs par heure ».
La palme revient à Nina Lisitsina, une juive qui aurait été raflée et qui aurait survécu à une fusillade alors qu’elle avait cinq ans. Elle se souvient de très nombreux détails :
- Que dans le camion qui l’emportait, il y avait deux gardes, « deux Allemands » (voir clichés) ;
- Que ce jour-là, elle portait « une robe en tricot, couleur sable » (voir clichés) ;
- Qu’ils ont été alignés sur le bord de la fosse « groupes de cinq ou six personnes » (elle ne sait plus si c’était 5 ou 6) (voir cliché) ;
- Que l’homme qui les faisait avancer vers la fosse était un Tatare « parla[nt] russe avec un accent » (voir cliché), etc.
Une telle mémoire chez une fillette de 5 ans est proprement incroyable. Mais ce n’est pas le seul élément incroyable de son récit. Elle prétend avoir survécu parce qu’au moment de la fusillade, la « grande dame en noir » qui était à côté d’elle et qui tenait un enfant dans ses bras - quelle mémoire ! - l’aurait bousculée. Elle serait alors tombée dans la fosse sans avoir été atteinte d’une seule balle. Toutefois, au moment d’expliquer comment les tireurs, qui donnaient ensuite le coup de grâce au blessés, ne l’auraient pas remarquée et tuée, sa mémoire lui fait soudainement défaut. Elle qui se souvenait jusqu’à présent de multiples détails lance : « Je ne me souviens de rien ».
Puis elle explique :
Si des corps me sont tombés dessus, je ne me souviens pas. Je me souviens juste que je me suis agrippée aux racines pour sortir [de la fosse]. C’était la nuit. Ils [les tireurs] étaient partis. Ils avaient donné le coup de grâce à tout le monde, comme d’habitude. Mon destin était de tomber sans avoir été fusillée.
Ce récit est si peu convaincant que dans son ouvrage, le Père Desbois lui en a substitué un autre, plus crédible.
Dans cette nouvelle version, N. Listsina n’évoque plus tous les détails d’avant l’exécution ; elle parle uniquement la fusillade et affirme :
- Qu’elle a perdu connaissance avant même que les tireurs ne fassent feu (« J’ai perdu connaissance, je n’ai même pas entendu les tirs » (p. 91). Oubliée l’intervention salvatrice de la femme en noir ;
- Que, « visiblement », les assassins « ne prenaient plus la peine de donner le “coup de grâce” à tout le monde » (Id.).
Oubliée l’ « habitude » qu’ils auraient eu d’achever les blessés.
C’est certes plus crédible, mais c’est contradictoire avec ce que l’on peut entendre sur le DVD.
Estimations contradictoires
Parfois, les témoins grossissent les chiffres de façon éhontée, sans être repris par le Père Desbois.
A. Tchoupira raconte par exemple que dans son village, un camp avait été aménagé dans lequel il y avait « environ 3 000 » juifs (qui ont finalement été tués).
Onze minutes plus tard, elle déclare : « Je crois qu’il y en avait 8 000 » (voir clichés). En moins d’un quart d’heure, donc, le nombre de victimes avait presque triplé !
Récits grotesques
Asphyxie dans les caves
Certains récits sont grotesques. Feodor Ilyuk prétend par exemple que dans son district, les juifs étaient tués de deux manières : en les fusillant le long d’une fosse ou en les asphyxiant dans des caves. A Krasnik, l’asphyxie était obtenue très simplement, en maintenant la porte du sous-sol fermée au moyen d’une planche clouée dessus.
Tireur attablé
Lui était chargé de transporter, sur un chariot, les cadavres ramassés dans les caves jusqu’à la fosse où les autres juifs étaient fusillés. Pour les fusillades, les Allemands utilisaient un seul tireur. Celui-ci restait assis quasiment toute la journée devant une table sur laquelle une bouteille de vodka et du saucisson avaient été posés.
Quand une fournée de juifs arrivait :
Il buvait un coup, mangeait du saucisson, après il pouvait tirer. Il utilisait cinq chargeurs par heure.
Elle n’a pas pu marcher pendant 4 ans
De son côté, Anna Tchouprina explique que dans son village, les policiers roumains battaient les juifs avant de les tuer. Le père Desbois interroge :
Pourquoi ils les battaient avant ?
Et le témoin de répondre :
Pour passer le temps.
Parce qu’ils « n’avaient rien à faire ». Pardi !
A. Tchoupira explique également que certains juifs enterrés dans la fosse n’étaient que blessés. Elle le sait car :
La terre remuait après qu’ils aient été enterrés.
Quand ils s’en sont aperçus, les Roumains ont exhumé les cadavres et les ont brûlés.
Tout cela était si horrible qu’après l’avoir vu, elle n’a « pas pu marcher pendant quatre ans ».
La terre qui remue
Le coup de la terre qui bouge se trouve également dans le récit de S. Arabski. Il raconte :
Je ne l’ai pas vu moi-même, mais on m’a dit que pendant deux jours, la terre a bougé. Il y en avait qui étaient encore vivants. Ils sont morts lentement, étouffés par le sable que l’on avait mis. Au bout d’un moment, du sang a commencé à apparaître à la surface de la terre.
Je lui ferai remarquer :
1°) Qu’une personne enterrée vivante met quelques heures, tout au plus, à mourir ;
2°) Que le sang échappé des cadavres enterrés s’infiltre plus profondément dans la terre, donc n’apparaît pas à la surface.
Les officiers SS dentistes et coiffeurs
La palme du grotesque revient sans aucun doute à Edem Smaïlovitch qui raconte qu’à Simféropol, les Allemands ne se contentaient pas d’arracher les dents en or de leurs victimes encore vivantes : après les avoir fait se déshabiller non loin des fosses, ils leur coupaient les cheveux. Ce travail était exécuté par deux officiers SS : l’un maniait la pince et les ciseaux, l’autre tenait un sac ouvert pour récupérer le tout.
Je n’exagère pas ; E. Smaïlovitch raconte qu’après le déshabillage :
Deux SS passaient avec un sac, coupaient les cheveux des gens, prenaient leurs boucles d’oreilles, leurs dents en or, leurs bagues, leurs chaînes. Ils les mettaient dans des sacs.
Peu après, il précisa que la besogne était effectuée par deux officiers, dont l’un « récoltait dans un sac ». Interrogé enfin sur la façon dont l’or dentaire était récupéré, il mima la scène en expliquant :
Ils arrachaient les dents avec une pince. Les gens étaient encore vivants.
Lui et ses camarades auraient vu tout cela de loin, à l’aide d’une paire de jumelles.
On imagine les deux officiers SS - qui n’avaient rien d’autre à faire en pleine guerre - passant parmi les futures victimes : le premier a dans ses poches une paire de ciseaux de coiffeur et une pince de dentiste. Il sort d’abord les ciseaux, coupe les cheveux qui tombent dans un sac tenu par le deuxième. Puis il range l’outil, inspecte la bouche du juif et sort la pince en cas de présence d’or dentaire.
Détails entièrement faux
Brûlés au fond d’un puits !
A plusieurs reprises, les détails donnés sont clairement faux. Anna Tchouprina, par exemple, déclare qu’une fois les juifs assassinés, un grand nombre d’entre eux étaient jetés dans un puits pour y être brûlés.
Elle précise :
Tout comme le Père Desbois, la pauvre semble ignorer qu’il est impossible de brûler des corps au fond d’un puits, même si celui-ci est vide : car vide ou pas, la circulation d’air au fond ne sera jamais suffisante pour alimenter le feu. Les premiers corps seront noircis en surface, ceux du fond resteront intacts.
Un « témoin » qui s’empêtre dans ses contradictions
Mais le cas le plus intéressant reste celui de l’antifasciste Galina Babikh.
Cette femme dit avoir assisté au prétendu massacre de Babi Yar. Avec quelques camarades de classe, ils auraient gravi en cachette une colline qui surplombait le ravin. De là, ils auraient vu les tueries à une cinquantaine de mètres :
On a vu les juifs s’approcher, petit groupe par petit groupe, en rangs, au bord du ravin .
Les gens étaient tués
au bord du ravin et ils tombaient du bord. Ceux qui ne tombaient pas étaient poussés dedans
Une fois un certain nombre de juifs tués, les Allemands
dynamitaient la terre et ils comblaient les trous : ils dynamitaient. Je crois que c’était de la dynamite […]. De la terre tombait toute seule [sur les corps]. Et ce spectacle horrible a duré trois jours entiers.
G. Babikh fut également interrogée sur des blessés qui auraient finalement pu échapper au massacre :
P. DESBOIS. - Est-ce qu’il y a des gens qui, lors des fusillades, ne sont que blessés ?
G. BABIKH. - Oui, comme je vous l’ai dit. Certains se sont échappés de la fosse en rampant jusqu’en haut. Des gens les ont recueillis. Je connaissais l’un d’entre eux, mort aujourd’hui.
Peu après, le Père Desbois revint sur cette question :
P. DESBOIS. - Elle dit que des gens sont ressortis vivants. Ils sont ressortis quand ?
G. BABIKH. - La nuit.
P. DESBOIS. - Et la nuit, la fosse n’était pas gardée ?
G. BABIKH. - Non, il n’y avait personne.
Ces deux dernières réponses étaient a priori de bons sens. Mais elles ne s’accordaient pas avec la thèse officielle reprise par le « témoin ». D’après cette thèse, en effet, les juifs avaient été regroupés dans le ravin le 28 septembre et tués pendant trois jours consécutifs. Or, à supposer qu’il n’y ait eu aucun garde la nuit, les victimes en auraient profité pour fuir, aidées par l’obscurité.
J’ignore si le Père Desbois pensa à cette objection insurmontable, mais il posa une question qui, même indirectement, allait appeler l’attention du « témoin » sur ce fait.
Il déclara :
Et les gens passaient voir la fosse ? Car cela devait être une surprise pour le quartier.
G. Babikh réfléchit un instant puis lâcha :
Non, je dois me tromper. Les fusillades ont duré trois jours. Des juifs étaient assis et attendaient leur tour. Ils devaient être gardés. Je l’ignore, on n’y allait pas [la nuit].
De façon évidente, l’objection insurmontable était soudainement apparue au « témoin ». Celui-ci fut donc contraint de se contredire (« Il n’y avait personne [aucun garde] »/« Ils devaient être gardés ») et, finalement, d’admettre qu’il n’avait rien vu (« on n’y allait pas »).
L’ennui est qu’auparavant, G. Babikh avait clairement déclaré que des blessés avaient pu s’enfuir des fosses pendant la nuit. Comment auraient-ils pu le faire en présence de gardes ? Il est dommage que le Père Desbois n’ait pas relevé cette nouvelle contradiction.
Par la suite le prêtre enquêteur l’interrogea ainsi :
Quand les gens sont tués, le soir, ils [les Allemands] mettent une couche de terre sur tous les corps ?
Le « témoin » confirma :
Oui, c’était systématique. On le savait à cause des explosions. On se doutait que c’était pour recouvrir les corps.
S’il en avait été ainsi, comment expliquer que les blessés recouverts par la terre tombée suite aux dynamitages aient pu non seulement survivre, mais aussi fuir ? Là encore, le récit de G. Babikh était totalement contradictoire.
Mais le Père Desbois s’abstint de toute question. Gageons cependant que s’il avait été contre-interrogé par un professionnel (un avocat américain, par exemple, spécialiste des affaires criminelles), le « témoin » se serait effondré et aurait été convaincu de mensonge.
Ces quelques développements portent sur les dix témoignages « les plus explicites » sélectionnés par le Père Desbois et son équipe. Sachant qu’il s’agit des dix meilleurs, on se demande ce que valent les autres. On comprendra donc pourquoi je ne suis pas impressionné par les centaines de récits apportés par le prêtre enquêteur. A la quantité, je préfère la qualité.
Naturellement, faute de les avoir tous étudiés, je ne puis prétendre que tous les témoins ont menti et qu’aucune des fosses indiquées n’existe. Mais même si l’exécution massive qu’ils rapportent (peut-être par ouï-dire) a réellement eu lieu, s’agissait-il de juifs ou le disent-ils aujourd’hui pour que leur récit soit pris en compte ? Et même s’il s’agit de juifs, ont-ils été tués uniquement en raison de leur race ou parce que l’occupant exerçait des représailles ?
Pour répondre à ces questions, l’expertise soigneuse des fosses se révèle nécessaire ainsi qu’une enquête historique précise. Tant qu’elles n’auront pas été menées, on ne pourra rien en déduire, et cela même si le Père Desbois nous apporte encore mille, deux mille, voire dix mille témoignages oraux de la même veine.
Les photos publiées par le Père Desbois
Mais les naïfs n’ont pas épuisé leurs arguments : « Vous oubliez les photos ! », me lanceront-ils. Dans leur ouvrage, en effet, Père Desbois et ses comparses ont publié une quarantaine de clichés d’époque, censés illustrer la « Shoah par balles ». Mais loin de sauver la thèse défendue dans le livre, ils mettent davantage en lumière le peu de sérieux et la malhonnêteté des auteurs. Voici pourquoi.
Remarque préliminaire
Tout d’abord je rappellerai que si la guerre à l’Est avait été menée selon les règles, des soldats en uniforme combattant d’autres soldats en uniforme, le moindre cliché montrant une exécution sommaire de civils serait un indice grave laissant soupçonner un crime. Mais sachant que les autorités soviétiques ont eu recours à la guérilla, une guérilla terrible à laquelle participait toute la population et qui entraînait des représailles de la part des occupants, la simple photo d’une exécution sommaire ne peut plus être considérée comme l’illustration certaine d’un massacre général et planifié d’une population civile.
En l’absence d’autres éléments probants, et surtout si les victimes ne forment qu’un groupe restreint de personnes, on doit au contraire privilégier la thèse de représailles organisées par l’occupant suite à des actions de francs-tireurs.
Clichés à écarter d’office
Voilà pourquoi j’écarterai immédiatement plusieurs clichés :
- Celui de la page 24 dont la légende porte : « Des officiers de la SD se préparent à pendre Mosche Kogan (à gauche) et Wolf Kieper sur la place du marché de Zithomir. 7 août 1941, Zithomir. »
Quelles qu’en soient les raisons, cette exécution sommaire est sans rapport avec la « Shoah par balles » ;
- Celui de la page 20 qui montre la fusillade de trois hommes. La légende porte simplement : « Membres des Einsatzgruppen faisant feu sur un groupe d’hommes debout dans une fosse. Circa 1941-1942. Lieu inconnu. » C’est trop imprécis pour être la preuve d’un crime contre l’humanité ;
- Les trois clichés de la page 71.
Le premier est très connu, il montre cinq hommes nus (trois adultes, un jeune et un enfant) qui vont certainement être exécutés sur le bord d’une fosse. Sur le deuxième, huit hommes nus sont agenouillés sur un monticule de terre. Quelques mètres derrière se tiennent deux soldats armés de fusils ; le premier regarde le photographe, le second (unique membre visible du peloton d’exécution ?) épaule son arme. Les deux légendes prétendent que les victimes sur le point d’être exécutées sont des juifs. Mais on ne sait ni la date ni le lieu où les photos ont été prises. Pour la première on lit : « Circa 1939-1943. Localisation inconnue » ; pour la deuxième : « 22 juin 1941-1943. URSS » Par conséquent, on ne sait rien des scènes montrées et, de ce fait, on ignore : a) l’origine ethnique des victimes (car aucun indice n’est visible qui viendrait la dévoiler), b) la raison pour laquelle ces gens ont été tués. Il est donc malhonnête d’en faire des juifs victimes de la « Shoah par balles ».
Le troisième cliché, quant à lui, montre un peloton d’exécution (une quinzaine d’hommes) qui tire sur un nombre indéterminé de personnes (une dizaine) placées dans une fosse en contrebas. La légende porte :
« Membres d’un Eisatzkommando tirant sur des juifs dans un champ à Dubossary, Moldavie. Les fusils sont des fusils Mauser. 14 septembre 1941. Dubossary, Moldavie, URSS.»
Tout d’abord, je soulignerai qu’en 1941, la Moldavie ne faisait pas partie de l’Ukraine. Cette photo ne devrait donc pas figurer dans l’ouvrage du Père Desbois. Mais passons, car même en admettant la véracité de la légende, on ignore les raisons de cette exécution : ces gens ont-ils été tués pour ce qu’ils étaient, ou parce qu’ils avaient commis des attentats, ou encore parce qu’ils avaient été choisis comme otages ?
Sans autre précision qui permettrait de répondre, il est parfaitement illégitime de privilégier la première hypothèse et, donc, de présenter cette photographie comme une illustration de la « Shoah par balles ». Voilà pourquoi, comme les autres, je la rejette d’emblée.
Les juives du ghetto de Mizocz
La thèse officielle
Je consacrerai un paragraphe particulier à la photo, très connue, de la page 77. Elle montre(rait) l’assassinat d’une trentaine de femmes et d’enfants.
D’après l’histoire officielle, il s’agit de juifs du ghetto de Mizocz qui furent assassiné le 14 octobre 1942 par la police allemande et la milice ukrainienne - sous-entendu, dans le cadre de l’extermination planifiée et systématique des juifs d’Europe[25]. Dans « Dites-le à vos enfants ». Histoire de la Shoah en Europe, 1933-1945, cette photo illustre le paragraphe intitulé : « L’assassinat en masse des femmes et des enfants ».
Les auteurs écrivent :
Le 14 octobre 1942 on conduisit un groupe de femmes juives, dont certaines enceintes, et d’enfants du ghetto de Mizocz, en Ukraine, jusqu’à un ravin en dehors de Rovno. Ils furent exécutés sommairement par la police allemande et la milice ukrainienne[26].
Le lecteur croira donc qu’un matin tranquille, des femmes et des enfants juifs du ghetto furent emmenés et exécutés sommairement, uniquement parce qu’ils étaient juifs, donc dans le cadre de la Shoah.
Enfin, si l’on en croit Simon Wiesenthal, la tuerie aurait bien été un assassinat de masse puisqu’elle aurait fait 1 800 victimes. Dans Le livre de la mémoire juive, on lit en effet : « 13 octobre 1942 : Les SS assassinent 1 800 juifs à Mizocz (Volhynie, RSS d’Ukraine) »[27].
Mensonges par omission
Ailleurs, j’ai déjà expliqué pourquoi je ne croyais pas en la réalité de la scène montrée sur cette photographie). Je crois au contraire qu’il s’agit d’une sinistre mise en scène réalisée à des fins de propagande. Cependant admettons que je me trompe. Oui, admettons que les victimes soient bien des juifs de Mizocz. Dans l’ouvrage du Père Desbois, les auteurs apportent des précisions très intéressantes. Ils expliquent que cette photo fut prise au moment de « la liquidation du ghetto de Mizocz, qui comptait approximativement 1 700 juifs » :
Au matin de la liquidation du ghetto (13 octobre 1942), certains de ses habitants se soulevèrent contre les Allemands et furent défaits après une courte bataille. Les membres restants de la communauté furent alors conduits depuis le ghetto jusqu’à cette ravine […] au sud de Rovno, où ils furent exécutés [p. 77].
A supposer, donc, que le cliché montre bien une exécution sommaire de juifs, il apparaît :
- Qu’il n’y a pas eu 1 800 tués mais beaucoup moins (quelques dizaines peut-être) ;
- Que l’exécution n’a pas été perpétrée dans le cadre d’une prétendu extermination systématique des juifs, mais afin de punir (et, sans doute, de faire un exemple) suite à une révolte armée qui avait eu lieu. A Nuremberg, d’ailleurs, l’accusé Julius Streicher admit sans peine que, en pleine bataille, il avait fallu réprimer sévèrement les actes de rébellion.
Interrogé par le lieutenant-colonel Griffith-Jones, il répondit :
[…] que, bien entendu, il ait fallu recourir à des exécutions en cas de sabotages par les juifs, ou à d’autres occasions, il est bien évident que pendant une guerre, cela va de soi [TMI, XII, 376].
Dès lors, la conclusion s’impose : même s’il est véridique, le cliché pris non loin de Mizocz n’est pas une illustration de la (prétendue) « Shoah par balle ». Il illustre uniquement la politique répressive allemande à l’Est pendant la guerre, une politique qui ne frappait pas uniquement les juifs.
C’est donc abusivement que le Père Desbois et ses comparses l’ont utilisé pour illustrer la « Shoah par balles ».
Les tueries (présumées) d’Odessa
Des versions sensiblement différentes
La même remarque peut s’appliquer à un récit fourni page 57. Les auteurs racontent que les 23 et 24 octobre 1941, à Odessa, 30 000 juifs environ auraient été raflés puis assassinés par les forces roumaines :
Le 24 octobre, les juifs furent extraits des prisons et conduits à la barrière de Dalnik, à la sortie d’Odessa, par les soldats roumains, et furent enfermés de force dans quatre entrepôts. Après avoir fermé les entrepôts, les soldats roumains tirèrent sur les prisonniers pendant des heures. Cette méthode d’assassinat n’ayant pas été jugée assez efficace, les soldats répandirent de l’essence dans les entrepôts et y mirent le feu, tuant ainsi tous les juifs arrêtés.
Dans son ouvrage, R. Hilberg donne une version des faits sensiblement différente. Il écrit :
[…] le 24 octobre, on emmena une foule de juifs à la ferme collective de Dalnik, située à une quinzaine de kilomètres à l’ouest [d’Odessa], pour les fusiller au bord de fossés antichars. L’opération, menée par fournée de quarante à cinquante et sur une étendue de plus de trois kilomètres, parut trop longue aux officiers roumains qui la dirigeaient : ils entassèrent les juifs restants dans quatre entrepôts d’assez grande taille et les firent mitrailler par les trous des murs, après quoi on incendia chaque bâtiment l’un après l’autre[28].
Une photo banale
Avant d’aller loin, je soulignerai ce qui suit : au haut de la page, le Père Desbois et ses comparses publient une photo prise en octobre 1941 à Odessa.
Y voit-on des fossés antichars remplis de corps ou des entrepôts calcinés avec des cadavres brûlés ? Non, le cliché montre des juifs (reconnaissables à l’étoile cousue au dos de leur manteau) qui marchent tranquillement dans une rue. La légende porte :
Des juifs ukrainiens allant se faire enregistrer après l’occupation d’Odessa par les armées allemandes et roumaines. 22 octobre 1941. Odessa, Ukraine.
On nous parle donc d’un abominable pogrom qui aurait fait 20 à 30 000 morts, et comme illustration, on nous montre des juifs qui vont tranquillement se faire enregistrer deux jours avant ce prétendu massacre. C’est vraiment se moquer du monde !
Représailles
J’ignore ce qu’il y a de vrai dans cette histoire et les versions sensiblement différentes qui circulent contribuent à éveiller ma méfiance. Mais il y a plus : même à supposer qu’Odessa ait connu un gigantesque pogrom en octobre 1941, on ne saurait l’imputer à une prétendu volonté de massacrer systématiquement tous les juifs d’Europe.
Dans l’ouvrage du Père Desbois, les auteurs lèvent un coin de voile en évoquant rapidement une explosion survenue le 22 octobre au QG des troupes roumaines qui occupaient la ville depuis le 16. Ils écrivent :
Le 22 octobre, une bombe placée au moment de leur retraite par les troupes soviétiques explose au quartier général des troupes roumaines, tuant des douzaines de soldats et d’officiers [p. 57, col. A].
Certes, on me répondra que les juifs de la ville n’y étaient pour rien. Mais consultons maintenant le livre de R. Hilberg. L’auteur dément la thèse de la bombe laissée par des soldats soviétiques et donne d’intéressantes précisions :
Aux premiers jours de l’occupation [roumaine], des incendies éclatèrent chaque nuit ; dans le même temps, d’après un observateur allemand, les Roumains s’en prenaient aux « éléments » juifs avec une « relative loyauté (verhältnismässiger Loyalität) » et sans « excès particuliers (besondere Ausschreitungen) ». Mais le 27 [erreur pour : 22] octobre au soir, des partisans firent sauter le quartier général roumain de la rue Engels, tuant le général Glogojanu, commandant de la 20ème division, et tout son état-major. On identifia trente-six morts, dont vingt et un officiers, allemands pour quelques-uns ; il en restait probablement d’autres sous les décombres [Voy. R. Hilberg, op. cit., p. 265.].
C’est pour répondre à ce très grave attentat commis par des partisans que les autorités roumaines organisèrent des représailles à vaste échelle.
Selon R. Hilberg, il y en eut trois vagues : dans la nuit du 22 et 23 octobre, des communistes et des juifs furent pendus publiquement sur l’ordre du général Trestioreanu ; le lendemain, 19 000 juifs auraient été fusillés et le 24, suite à un ordre du maréchal Ion Antonescu du fusiller 200 communistes pour chaque officier tué et 100 pour chaque soldat, aurait eu lieu le massacre de Dalnik.
Si les estimations données sont vraies, il va de soi que les représailles étaient hors de toute mesure. Cependant, il n’en reste pas moins vrai que les événements d’Odessa s’inscrivaient dans le cadre de représailles menées pour répondre à la guerre des partisans, pas dans le cadre d’une prétendu « Shoah par balles ». C’est donc de façon illégitime que le Père Desbois et ses comparses les mentionnent.
Clichés a priori plus inquiétants
Cela dit, venons-en aux clichés qui suggéreraient l’existence d’exécutions collectives massives entièrement gratuites (donc imputables à une volonté d’extermination systématique). Je dis bien « suggéreraient », car nous allons voir que dans la majorité des cas, faute d’images explicites, les auteurs font appel à notre imagination.
Légende illégitime
Un premier exemple se trouve à la page 47. Une photo montre des civils (une trentaine d’hommes et de femmes) travailler la terre avec des pelles ou à mains nues.
Autour, des gens (en majorité des hommes en uniforme) regardent la scène. A l’arrière-plan, une bâtisse apparaît.
La légende porte :
Des membres d’un Eisatzkommando inconnu et leurs aides civils d’origine allemande regardent des hommes et des femmes forcés à creuser leurs propres tombes. 4 juillet 1941. Slarov, URSS.
Là encore, je souligne que ce cliché, que l’on nous dit avoir été pris en URSS, ne devrait pas figurer dans un ouvrage sur l’Ukraine. Acceptons-le quand même.
Je note que rien ne vient confirmer la légende. En particulier, les trous pratiqués avec les pelles sont trop petits pour en déduire avec certitude qu’ils vont servir de tombes, même individuelles.
J’ajoute qu’au premier plan, à l’extrême droite, une femme paraît tasser avec ses mains un petit monticule de terre. D’autres l’aident. A quelques mètres derrière, un autre monticule semblable apparaît. S’agit-il de sépultures ou de tout autre chose (car il n’apparaît pas que la scène se passe dans un cimetière) ? On ne saurait le dire.
Quoi qu’il soit, rien ne vient prouver que ces gens seraient :
a) Des juifs
b) Des futures victimes en train de creuser leurs tombes. Ils semblent au contraire accomplir un travail assez anodin. Je souligne enfin qu’on ne distingue pas les bords de la photo. Elle n’est donc pas complète. Il serait intéressant d’en connaître la totalité, peut-être y découvrirait-on la nature de ces monticules de terre.
Aucun indice en guise de confirmation
A la page 65, le cliché en haut à gauche montre un groupe d’hommes devant un tas de vêtements et/ou de couvertures. Au gauche, on voit l’arrière d’une remorque.
La légende porte :
Des prisonniers juifs sont forcés de se déshabiller avant leur exécution par des auxiliaires ukrainiens. 1942. Tchernigov, Ukraine.
Malgré le tas de tissus au sol, aucun des hommes visibles sur la photo n’est nu, à demi nu ou même en chemise. Tous sont au contraire chaudement habillés. Certes, l’un d’entre eux tient un lourd manteau à la main, mais sans autre indice, on ignore ce qu’il fait ; peut-être ne fait-il que récupérer ce manteau qui était au sol.
Notons enfin que les deux auxiliaires reconnaissables sur l’image à leur brassard blanc ne semblent pas armés. Par conséquent, rien ne vient donner un semblant de crédit à la légende : on ignore s’il s’agit de juifs et s’ils se déshabillent. Ce document ne peut donc absolument pas être considéré comme une illustration de la « Shoah par balles ». C’est totalement inepte !
Les cas des femmes en sous-vêtements
Sur la même page, en bas à droite, figure une photographie a priori plus inquiétante. Face à cinq hommes (deux en uniforme et trois en civil) dont trois, au moins, portent une arme, sont assis un homme (habillé) et une trentaine de femmes d’âges divers qui ne portent plus que leurs sous-vêtements. On distingue nettement à leur côté leurs vêtements posés à terre.
La légende porte :
Des membres de la police allemande aidés d’auxiliaires en habits civils regardent un groupe de femmes juives forcées de se déshabiller avant leur exécution. 1939-1943. Lieu inconnu. Localisation possible : Dvinsk, Bochnia et Sniadowa.
Là encore, sachant que ni le lieu ni la date de la scène ne sont connus et qu’aucun indice ne vient laisser soupçonner l’origine ethnique de ces femmes, on ne voit pas comment les auteurs peuvent en déduire qu’il s’agit de « juives ».
De plus, ces femmes en sous-vêtements ne poursuivent pas leur déshabillage : elles sont maintenant assises et attendent tranquillement (certaines, au fond, paraissent converser entre elles). Par conséquent, la légende jointe au cliché est totalement illégitime : on ignore ce qui s’est passé dans les minutes qui ont suivi la prise de cette photographie.
Sachant que les Allemands ont réquisitionné de la main d’œuvre dans les territoires de l’Est, on peut très bien penser que ces femmes, probablement requises de force (d’où la présence de quelques sentinelles), allaient passer une visite sanitaire.
L’affaire de Kamenets-Podolsk
A la page 57, les auteurs racontent que les 27 et 28 août 1941, 23 600 juifs auraient été fusillés à une dizaine de kilomètres de Kamenets-Podolsk « et jetés dans des fossés antichars creusés au moment de l’invasion allemande en URSS »[29].
Un juif conducteur de camion, Gyula Spitz, aurait été le témoin de ces exécutions. Muni d’un appareil photo, il prit certains clichés depuis son véhicule. Les auteurs en publient un. Va-t-on enfin voir un massacre ? Non. Le cliché, parfaitement anodin, montre une colonne de personnes qui marchent le long d’une rue pavée.
La légende porte :
Colonnes de juifs conduits sous la garde de soldats allemands dans les rues de Kamenets-Podolsk, Ukraine, vers un site d’exécution situé en dehors de la ville. 27 août 1941. Kamenets-Podolsk, Ukraine.
Je note que sur la photographie, on ne distingue qu’une sentinelle alors que la colonne visible est constituée de plusieurs dizaines d’hommes. Voilà comment les auteurs « illustrent » le (prétendu) massacre de 23 600 juifs.
C’est vraiment se moquer du monde !
Si, vraiment, plus de 20 000 personnes ont été massacrées et jetées dans des fossés antichars, une telle tuerie (bien localisée) a dû laisser de traces matérielles, de très nombreuses traces. C’est elles que nous voudrions voir, et pas un cliché anodin montrant des gens qui marchent sans qu’on sache s’il s’agit de juifs, d’où ils viennent et où ils vont.
Le cas du ravin de Babi Yar
La thèse officielle
D’après la thèse officielle, les 29 et 30 septembre 1941, 30 000 juifs auraient été assassinés et enterrés dans le ravin de Babi Yar. Sans surprise, les auteurs attachent une grande importance à ce prétendu massacre. A la page 89 , ils résument le récit d’une « survivante » qui témoigna lors d’un procès intenté en janvier 1946 à Kiev contre 15 Allemands et Autrichiens accusés d’avoir participé à la tuerie.
Le passage suivant à plus particulièrement retenu mon attention ; dans leur résumé, les auteurs écrivent :
C’est à ce moment, selon certaines versions de son témoignage, que sa mère essaie de la sauver en criant qu’elle n’est pas juive [p. 89, col. B].
J’en déduis que D. Pronicheva a donné plusieurs récits qui ne s’accordent pas tous entre eux. Je connais suffisamment ce genre de « témoin » (voy. le cas de Marguerite Rouffanche dans l’affaire d’Oradour-sur-Glane) pour ne pas lui accorder une grande confiance.
Les 29 photos prises par un Allemand
On me répondra que six pages plus loin, les auteurs publient 29 photographies qui auraient été prises à l’époque par un militaire allemand présent sur les lieux, Johannes Hähle (mort en 1944). C’est vrai.
Mais on n’y trouve pas la preuve d’une gigantesque tuerie fin septembre 1941. Les trois premières montrent une colonne de gens qui marchent sur un large trottoir. Trois cadavres gisent au sol (la première et la troisième photo montrent les deux mêmes cadavres sous deux angles différents).
La légende porte à chaque fois :
Cette image montre peut-être le rassemblement des juifs de Kiev avant leur exécution à Babi Yar.
Notez le « peut-être » ; en vérité, on ignore tout : s’il s’agit de juifs, d’où ils viennent et où ils vont.
Mes doutes sont renforcés par le fait qu’aucun gardien (armé ou non) n’est visible sur ces photos. Malgré la présence inquiétante de cadavres, la colonne marche sans aucune surveillance. J’ai donc du mal à croire qu’il s’agit de victimes menées à l’abattoir.
Les dix images suivantes (6 à 15) montrent des tas d’effets personnels posés sur le sol dans le ravin : des vêtements, des bottes, un carnet, des photographies, un chapeau, une poupée et même une jambe artificielle.
La légende du cliché n° 6 porte :
Lorsque Hälhe arrive sur le site de Babi Yar, il pénètre dans la ravine et photographie les milliers de vêtements appartenant aux juifs assassinés.
Admettons que les milliers de juifs aient été assassinés. Va-t-on voir leurs cadavres sur les photos suivantes ? C’est ce que tout le monde attend. Mais non ! Les trois photographies numérotées 16 à 18 montrent des hommes en uniformes qui sont munis de pelles et qui travaillent au fond du ravin. Les légendes portent :
[Cliché 16] Dans les premiers jours du mois d’octobre, environ 300 prisonniers de guerre soviétiques sont réquisitionnés pour enterrer les corps dans la ravine. Sur cette photographie environ 150 d’entre eux égalisent la couche de terre au-dessus de la fosse commune sous la surveillance de soldats allemands.
[Cliché 17] Le prisonnier de guerre BV Sokolov confirme dans un témoignage recueilli après la guerre que, en octobre 1941, environ 300 prisonniers de guerre furent réquisitionnés pour reboucher la ravine. Sur la photographie on voit également un soldat allemand montrant les hommes en train de travailler au fond du ravin.
[Cliché 18] Prisonniers de guerre soviétiques réquisitionnés égalisant la couche de terre au-dessus de la fosse commune du ravin de Babi Yar sous la surveillance de soldats allemands (au fond et en haut à gauche).
Le ravin a donc été rebouché sans qu’on ait pu voir les corps. Quelle malchance !
Les deux photographies numérotées 19 et 20 montrent une colonne de femmes qui attendent.
La première porte deux paniers tressés. Sur le cliché 19, devant la file, une sentinelle armée d’un fusil parle avec un homme muni d’un brassard. Sur le 20, la sentinelle s’est éloignée, seul reste l’homme au brassard. Les auteurs déclarent que la colonne se compose de « femmes ukrainiennes peut-être venues dans l’intention de piller les biens des juifs après leur assassinat dans le ravin de Babi Yar ».
Une nouvelle fois, cependant, aucun indice, si petit soit-il, ne vient confirmer cette légende accusatrice. On ignore totalement qui sont ces femmes, ce qu’elles attendent et ce qu’elles vont faire.
Les deux images qui suivent ne nous éclairent pas. Numérotées 21 et 22, elles montrent deux cadavres qui gisent sur un trottoir.
Sur la 21, trois femmes passent devant sans y prêter la moindre attention ; sur la 22, deux hommes munis de sacs passent devant et les regardent sans s’arrêter. Les auteurs écrivent à chaque fois :
Cette image montre peut-être le rassemblement des juifs de Kiev avant leur exécution à Babi Yar.
Sachant que, d’après la thèse officielle, les prétendus massacres de Babi Yar auraient eu lieu les 29 et 30 septembre et que, sur une pellicule, les photos se suivent par ordre chronologique, on ne voit guère comment J. Hähle aurait pu à nouveau photographier « le rassemblement des juifs de Kiev avant leur exécution ». Cette erreur grossière confirme le manque total de sérieux des auteurs lorsqu’ils rédigent des légendes.
Les huit derniers clichés, enfin, montrent différents lieux et monuments de Kiev. Ce sont des photos prises par un homme qui profitait de sa présence dans la ville pour faire un peu de tourisme. Elles sont sans intérêt dans le cadre de notre étude.
Finalement, tout ce que les clichés attribués à J. Hähle peuvent démontrer, c’est qu’en septembre 1941, une grande quantité d’effets personnels ont été déposés dans le ravin de Babi Yar près de Kiev et que peu après, des prisonniers de guerre soviétiques ont travaillé au fond de ce ravin. Point final.
Personnellement, je serais prêt à croire que ces effets ont été volés à des juifs et qu’ils ont été au moins en partie redistribués aux populations locales. Mais même à admettre cette thèse, les photos restent muettes sur le sort des juifs.
Certes, les prisonniers soviétiques qui remuent la terre au fond du ravin peuvent laisser penser à un gigantesque crime. Mais si l’on reste libre de soupçonner, il est en revanche interdit d’accuser sans preuve matérielle solide. Or, non seulement ces preuves font défaut, mais je rappelle que dans son ouvrage paru en 1992, l’expert canadien John Ball s’est appuyé sur des photos aériennes d’époque pour démontrer la fausseté de la version officielle[30].
Sur les clichés, on ne distingue rien qui permettrait de conclure que des milliers de personnes venaient d’être assassinées et enterrées dans le ravin.
J’ajoute que la thèse du massacre de masse heurte le bon sens. En effet, si les événements survenus à Babi Yar fin septembre 1941 avaient dû être tenus secrets, aucune photo n’aurait été faite (les Soviétiques n’ont rien photographié à Katyn et à Vinnytsia).
Sachant que, au contraire, de nombreux clichés ont été pris, qui montrent de plus un ravin non entouré de palissades, avec des civils qui peuvent approcher (photo n° 17) et des effets posés à sol à la vue de tous, on en déduit que les événements n’étaient absolument pas tenus secrets.
Dès lors, à supposer qu’il y ait eu un massacre, on ne voit pas pourquoi J. Hähle, qui avait pu pénétrer dans le ravin et photographier les affaires des « victimes », n’aurait pas également fixé sur sa pellicule soit des fusillades, soit des corps dans les fosses au moment de leur rebouchage.
Pourtant, c’est ce qu’on nous demande de croire : on nous demande de croire que les « assassins » ont consciencieusement photographié toutes les étapes du massacre - la conduite des victimes vers le lieu de leur exécution, les effets personnels abandonnés (y compris une jambe artificielle), les fosses communes comblées et les femmes qui viennent piller les biens laissés par les disparus - toutes sauf les deux principales : les fusillades et le rebouchage des fosses. C’est contraire au bon sens.
Dès lors, même à supposer que la thèse des juifs dépouillés se confirme, tout porterait à croire que les victimes auraient ensuite été déportées ailleurs, dans un ghetto ou un camp de rassemblement. Quant aux prisonniers soviétiques, leur présence au fond du ravin peut parfaitement être expliquée par la nécessité d’enterrer tous les effets personnels qui, brisés ou sans aucune utilité, n’avaient pu être récupérés.
Le cas de Vinnytsa
Les mêmes remarques pourraient être faites à propos d’une photographie publiée page 83 et qui montre, de loin, deux ou trois hommes au milieu d’un amas de tissus.
La légende porte :
Des hommes non identifiés examinent dans un champ les effets personnels de 4 000 juifs tués à Vinnitsa. 1941-1942[31].
Qu’ils examinent des effets personnels, soit, mais rien ne vient prouver que leurs légitimes possesseurs avaient été assassinés. Et s’ils l’ont été, de qui s’agissait-il et qui sont les coupables ? On se rappelle en effet qu’en 1943, à Vinnytsa, les Allemands ont découvert des charniers contenant des milliers de victimes du NKVD. Dès lors, la prudence s’impose face à ce cliché qui a peut-être été pris lors de l’ouverture de ces fosses.
La seule fosse commune montrée
Finalement, la seule fosse commune montrée avec ses cadavres se trouve à la page 77.
A l’arrière-plan, trois hommes en uniforme, sans doute des soldats allemands, observent des corps.
La légende porte :
Une fosse commune contenant les corps de 7 000 juifs. Septembre 1941-1942. Proskurov, Ukraine.
Curieusement, le cliché n’est pas daté précisément, alors que, d’après la thèse officielle, le massacre de Proskurov aurait eu lieu le 30 novembre 1942[32]. Ce simple fait suffit à éveiller la méfiance.
J’ajoute qu’une fois encore, les bords de la photo sont invisibles, suggérant qu’elle n’a pas été reproduite dans son intégralité. Dès lors, qui sont ces personnes dont les corps ont été entassés dans ce charnier et quelle est la cause réelle de leur mort ? Sans autre précision, il est impossible de conclure.
L’ « expertise » de Busk
J’en termine avec le seul site qui a été l’objet de fouilles : Busk.
D’après l’histoire officielle, le ghetto du lieu a été liquidé le 19 mai 1943.
Pas une expertise médico-légale
Dans un premier temps, je souligne qu’aucune expertise médico-légale n’a été effectuée, mais seulement une « expertise archéologique de 15 fosses » (p. 106).
La nuance est de taille, car si l’on a bien creusé pour retrouver des ossements, l’ouvrage du Père Desbois ne parle d’aucun examen destiné à la cause de la mort des victimes. Certes, la photo 8 montre(rait) « une balle déformée trouvée dans la fosse n° 17 » et la n° 9 un fragment de crâne trouvé dans la fosse n° 16 avec « une perforation […] provoquée par une balle dans la nuque ». Mais même à supposer que ces légendes reflètent la réalité, une simple balle et une perforation crânienne ne permettent pas de formuler une conclusion générale applicable aux dizaines d’autres victimes.
Dans le même registre, les clichés 11 et 12 montrent quatre squelettes que les auteurs qualifient de « fusillés » :
11. Fosse n° 10 : trois squelettes allongés face contre terre. Un tel emplacement démontre que les gens ont été fusillés directement dans la fosse.
12. Fosse n° 1, le squelette d’un homme fusillé.
Mais rien ne vient prouver ces assertions : ni trace d’impact dans le crâne ou ailleurs, ni balles qui devraient être retrouvées auprès des squelettes (puisque les gens ont auraient été fusillés dans la fosse). De plus, pourquoi l’équipe du Père Desbois ne montre-t-elle pas les douilles qui, cette fois, devraient être retrouvées en masse aux alentours des charniers ?
Des victimes dont on ignore l’origine
Une autre question doit ensuite être posée : s’agit-il de juifs ? Certes, la découverte de fosses près d’un cimetière israélite peut le laisser supposer. Mais dans son ouvrage déjà cité, S.P. Melgounov parle du massacre des officiers et des fonctionnaires militaires blancs en Crimée en 1920-1921.
Il raconte qu’à Simféropol, des fusillades de femmes et d’enfants eurent lieu derrière le « Cimetière juif »[33].
Par conséquent, la proximité immédiate d’un cimetière israélite n’est pas la preuve que les charniers contiennent des restes de juifs.
Pour en apporter la confirmation, il faudrait exhiber des objets qui auraient été découverts avec les cadavres et qui attesteraient sans doute possible leur origine ethnique. Mais le Père Desbois et son équipe n’en montrent aucun.
On ignore la date du massacre
Allons plus loin. Supposons qu’il s’agit effectivement de juifs assassinés. Encore faudrait-il établir avec exactitude la date du massacre. On sait en effet qu’entre 1918 et 1940, des centaines de milliers de juifs ukrainiens ont été tués sans que les « nazis » y soient pour quelque chose.
Or, dans l’ouvrage du Père Desbois, on ne trouve aucune trace d’une quelconque tentative de datation : aucune douille, aucune pièce, aucune analyse microscopique des restes humains. Rien. Dès lors, connaissant l’histoire chaotique de l’Ukraine, toute conclusion est impossible.
Aplomb monumental
Mais le Père Desbois et ses comparses n’ont en cure ! Avec un aplomb typiquement juif, ils écrivent :
Les résultats de cette expertise sont en accord avec les déclarations des témoins enregistrées à Busk par Yahad-In Unum, en ce qui concerne l’emplacement des fosses, la date des massacres ainsi que l’identité et le nombre des victimes de ces exécutions [p. 106, col. C.].
Et ils concluent ainsi :
Ces résultats [du Busk] confirment la terrible réalité du génocide par balles mené entre 1941 et 1944 en Ukraine et sur l’ensemble du territoire soviétique par les troupes nazies [Id.].
Ainsi, une vingtaine de fosses communes découvertes dans une petite localité ukrainienne viendrait confirmer le massacre systématique de plus d’une million de juifs sur tous les territoires soviétiques entre 1941 et 1944 par les « nazis ».
Dans les annales de l’impudence et de l’aplomb, cette conclusion mérite de figurer aux premières places.
Conclusion
On retrouve chez P. Desbois les procédés habituels des exterminationnistes :
- Invocation de directives orales qui permettent de pallier l’absence d’ordres ;
- Recours aux « aveux » d’après-guerre ;
- Confiance aveugle accordée aux « témoins » 60 ans après ;
- Publication de « témoignages » tronqués ;
- Utilisation abusive de clichés avec des légendes non étayées et des appels incessants à l’imagination ;
- Preuves de substitution (1 tas de vêtements = 1 juif assassiné)
- Absence de vérifications matérielles sérieuses, en particulier, aucune expertise médico-légale des restes humains retrouvés ;
- Généralisations totalement illégitimes.
Dès lors, la conclusion s’impose : l’ouvrage du Père Desbois ne confirme en aucun cas la réalité de la « Shoah par balles » en Ukraine. C’est l’œuvre d’une équipe qui, partant d’un présupposé (la « Shoah par balles » a existé), prétend découvrir des preuves là où il n’y a tout au plus que de faibles indices à confirmer par une enquête sérieuse et méthodique.
C’est cette enquête sérieuse que j’attends : elle nécessitera l’expertise soigneuse des fosses localisées par une commission internationale.
Non contents de mettre au jour des ossements humains, ses membres devront à chaque fois les examiner pour tenter de les dater, de découvrir leur origine ethnique et la cause de la mort. Et s’il se révèle que les victimes sont des juifs fusillés, alors il faudra effectuer des recherches documentaires pour tenter de connaître les raisons de cette exécution : les victimes ont-elles été fusillées uniquement parce qu’elles étaient juives ou pour une toute autre raison ?
Certes, une telle enquête durera sans doute des années et nécessitera de gros capitaux, mais tant qu’elle n’aura pas été menée et tant qu’aucun rapport exhaustif n’aura été publié, avec toutes les pièces nécessaires, la « Shoah par balles » ne pourra pas être considérée comme établie.
A ceux qui contesteront cette conclusion, je répondrai ce qui suit :
Supposez que, demain, votre meilleur ami soit accusé d’un crime, d’un seul crime.
Au tribunal, trois « témoins » viennent dire qu’il a effectivement tué une personne et qu’il l’a enterrée à l’orée de tel bois. Le procureur montre en outre la photo d’un tas d’habits qu’il dit avoir appartenu à la victime.
Trouveriez-vous juste que votre meilleur ami soit condamné sur la foi de ces seuls éléments, c’est-à-dire sans que la Justice ait pris la peine de creuser à l’endroit indiqué par les « témoins » ?
Si le contestataire répond oui, alors je ne peux plus rien pour lui. Mais si - comme je le prévois - il répond non, alors je lui ferai remarquer qu’il ne saurait y avoir deux poids et deux mesures.
Les méthodes réclamées pour le meilleur ami doivent également être appliquées aux « nazis ».
Je terminerai en soulignant ceci : certains pourront penser que la « Shoah par balles » a été subitement mise sur le devant de la scène afin de remplacer, à moyen terme, le mythe de la « Shoah par gaz » qui est en train de sombrer. Personnellement, je n’y crois pas.
Les fanatiques de la Mémoire refuseront toujours d’abandonner le mythe des chambres à gaz homicides allemandes. L’explication est ailleurs.
On se souvient de la campagne de presse orchestrée en 1993 autour du livre de feu Jean-Claude Pressac : un pharmacien athée venait d’apporter la preuve définitive que la « Shoah par gaz » avait bien eu lieu. Quinze ans après, nous assistons à une opération semblable : cette fois, c’est un prêtre qui, dit-on, apporte la preuve que la « Shoah par balles » a bien eu lieu, en Ukraine et ailleurs. Alléluia ! L’opération du Père Desbois est donc utilisée par les fanatiques de la Mémoire pour laisser croire qu’en matière de Shoah, il y a du nouveau, et que ce nouveau viendrait confirmer la thèse officielle imposée depuis Nuremberg.
Par conséquent, loin d’être une solution de rechange, la « Shoah par balles » va au contraire renforcer le mythe de la « Shoah par gaz ». Les fanatiques de la Mémoire diront : « Les Allemands ont commencé par fusiller, puis ils ont asphyxié »
Pour les exterminationnistes, la « Shoah par balles » présente un triple avantage sur la « Shoah par gaz » :
1°) A la différence de la chambre à gaz d’exécution collective qui n’a pas pu exister pour des raisons physico-chimiques, le type d’arme qui aurait servi à fusiller les centaines de milliers de juifs - l’arme à feu - a incontestablement existé ;
2°) Alors qu’aucun juif n’a été gazé à Auschwitz ou ailleurs, il est indéniable qu’à l’Est, où une féroce guerre des partisans s’est déroulée, des juifs (y compris des femmes et des enfants) ont été tués entre 1941 et 1944. Les fanatiques de la mémoire pourront donc toujours invoquer ces tueries réelles en les présentant comme des épisodes tragiques de la « Shoah par balles » ;
3°) Alors que la « Shoah par gaz » aurait eu lieu dans quelques endroits bien localisés, ce qui rend les contre-enquêtes plus aisées, le théâtre de la prétendue « Shoah part balles » est immense : il couvre non seulement l’Ukraine, mais aussi une partie des autres anciens territoires soviétiques. Dès lors, les exterminationnistes pourront toujours profiter de la découverte d’un charnier ici ou là pour déclarer qu’il s’agit d’autres victimes des « unités mobiles nazies ». Pour les révisionnistes dépourvus de moyens, il sera très malaisé, voire impossible, de mener à chaque fois la contre-enquête nécessaire.
Voilà pourquoi je suis persuadé que la thèse « Shoah par balles » est promise à un bel avenir. Alors que la « Shoah par gaz » était une citadelle aisément facile à prendre d’assaut, sa sœur siamoise apparaît comme un camp retranché quasiment inexpugnable.
Naturellement, cela ne doit pas nous décourager. Dès aujourd’hui, il convient d’y mettre le siège. C’est ce que j’ai fait en rédigeant une première critique du livre du Père Desbois et en démontrant qu’il ne pouvait absolument pas être considéré comme confirmant la réalité de la « Shoah par balles ». D’autres recherches seront toutefois nécessaires afin d’éclairer les multiples zones d’ombre qui subsistent (notamment à propos de certaines photographies). J’espère que, malgré la répression et le manque de moyens, les révisionnistes pourront les mener à bien.
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[1] Voy. In the Shadow of Death. Statement of a Red Cross Sister on the Bolshevist. Prisons in Kiev (Arkhiv Revolioustii, VI.)
[2] « Parmi les massacres les plus significatifs, notons […] celui des 50 000 soldats blancs faits prisonniers en Crimée en 1920 » (texte intitulé : « le bilan du communisme », consultable à l’adresse suivante : http://www.catallaxia.org/npds/article.php?sid=289).
[3] Voy. S. P. Melgounov, La Terreur Rouge en Russie (1918-1924), (éd. Payot, 1927), p. 73.
[4] Voy. W. N. Kokovtzoff, Le bolchevisme à l’œuvre. La ruine morale et économique dans le pays des soviets (éd. Marcel Giard, Paris, 1931), p. 308.
[5] Voy. Maurice Laporte, Les Mystères du Kremlin (éd. La renaissance moderne, Paris, 1928), pp. 183-4. Dégoûté par ce qu’il avait vu en Russie soviétique, Maurice Laporte quitta le Parti communiste et rédigea son livre pour dénoncer le bolchevisme.
[6] « C’est au printemps 1933 que la mortalité atteint les plus hauts sommets. A la faim s’ajoute le typhus. » http://edechambost.ifrance.com/famine_Ukraine/famine_ukraine_lesfaits.htm.
[7] [« Les archives démographiques et les recensements de 1937 et de 1939, tenus secrets jusqu’à ces dernières années, permettent d’évaluer l’ampleur de la famine de 1933.
Géographiquement, la “zone de la faim” couvre l’ensemble de l’Ukraine, une partie de la zone des terres noires, les riches plaines du Don, du Kouban et du Caucase du Nord, une grande partie du Kazakhstan.
« Près de quarante millions de personnes sont touchées par la famine ou la disette. Dans les régions les plus atteintes, comme dans les zones rurales autour de Kharkov, la mortalité est multipliée par dix, entre janvier et juin 1933, par rapport aux moyennes normales (100 000 décès en juin 1933 dans la région de Kharkov, contre 10 000 en janvier). Encore faut-il noter que de très nombreux décès n’étaient pas enregistrés. Les zones rurales sont bien sûr plus durement frappées que les villes, mais celles-ci ne sont pas épargnées : Kharkov perd, en un an, 120 000 habitants, Krasnodar 40 000, Stavropol 20 000. En dehors de la “zone de la faim”, les pertes démographiques, dues en partie à la disette, ne sont pas négligeables dans les zones rurales de la région de Moscou, la mortalité augmente de 50 % entre janvier et juin 1933 ; dans la ville d’Ivanovo - théâtre de plusieurs émeutes et grèves de la faim en 1932-1933 -, la mortalité progresse de 35 % au cours du premier semestre 1933.
« Pour l’année 1933, et pour l’ensemble du pays, on observe un surplus de décès supérieur à six millions.
« Le taux de mortalité en 1933 atteint 71,6 pour mille (contre 29,5 pour mille en 1932). L’immense majorité de ce surplus de décès étant dû à la famine, on peut valablement estimer à six millions de victimes environ le bilan de cette tragédie programmée. La paysannerie d’Ukraine paie le plus lourd tribut : au moins quatre millions de morts. Un million de morts au Kazakhstan, notamment parmi la population nomade privée, depuis la collectivisation, de la majeure partie de son bétail. Un million de morts dans le Nord-Caucase et la région des terres noires » (Nicolas Werth, in L’Histoire, n° 188, mai 1995, consultable à l’adresse suivante : http://lesbonsdocs.com/docs/famineenukraine.htm).
[8] Voy. L’article de J. Chevtchenko intitulé « Bykivnya, la mémoire 70 ans après les crimes communistes » et consultable à l’adresse suivante : http://www.ukraine-europe.info/ua/dossiers.asp?1181041781.
[9] « 6. Après avoir compté les corps dans les tombes ouvertes, les chiffres minima sont : a) le verger, 5 644 (dont 33 femmes) ; b) le cimetière, 2 405 (dont 85 femmes) ; c) le parc national, 1 393 (dont 31 femmes). Ensemble 9 442 victimes » (extrait du « Rapport médico-légal sur les meurtres collectifs de Vinnytsia », rédigé par le professeur Schräder, de l’Université de Halle [Allemagne], qui, en juin 1943, avait été nommé président d’une Commission médicale d’enquête. Ceux qui l’on publié sur Internet ajoutent : « Le nombre total de cadavres dans les trois sites de Vinnytsia s’élève à 11.000-12.000. » [http://www.ukraine-europe.info/ua/dossiers.asp?1181041438]).
[10] Voy. Les grands dossiers de l’Illustration. « La Révolution Russe » (éd. Sefag et l’Illustration, 1987), p. 100, col. B.
[11] Voy. B. Lecache, Quand Israël meurt (éd. du « Progrès Civique », Paris, sd).
[12] Voy. Herbert Verbeke, « La faillite lamentable de l’exposition sur les crimes de la Whermacht », publié dans Nouvelle Vision, n° 2, 16 décembre 1999, pp. 73-75, 76-77.
[13] Voy. Frankfurter Allgemeine Zeitung, 30 octobre 1999, p. 11. L’auteur ne donne aucune référence qui permettrait d’étayer son affirmation, mais la présence de juifs parmi les bourreaux ressort de nombreux témoignages recueillis par les autorités allemandes après les massacres. En voici trois, choisis parmi d’autres :
- Déposition sous serment de l’Ukrainien Omelian Malta : « Parmi les gens du NKVD, j’ai reconnu à la voix le juge d’instruction capitaine Schneider qui est juif » (Voy. Les Crimes bolchevistes contre les lois de la guerre et de l’humanité, édité par le Ministère des Affaires étrangères allemand, Berlin, 1941, pp. 34-5).
- Rapport de la Prévôté aux armées X en date du 7 juillet 1941 sur les massacres des bolchevistes à Lvov (Lemberg) : « […] à Lemberg également, les juifs étaient en communion étroite avec les bolcheviks et […] par la suite, tout au moins indirectement, ils ont livré maintes victimes au fer du bourreau » (Ibid., doc. 1, p. 21).
- Rapport sur les atrocités de Dubno : « Parmi les assassins se trouvait la secrétaire de la prison, la juive Bronstein - qui a tué de ses propres mains, à coups de pistolet, de nombreux prisonniers […]. le chef responsable de ce massacre en masse commis à Dubno par les bolchevistes est le directeur de la prison, le commissaire de la Guépéou commandant Winckur, un juif. Ont partagé la responsabilité le juge bolcheviste Jeremenko et le notaire bolcheviste de la prison, dont l’administration était exclusivement entre les mains des juifs […]. Fait remarquable, le commandant juif Winckur avait libéré tous les juifs détenus à la prison le 24 juin au soir » (Ibid., p. 64).
[14] Voy. Doc. TMI 1604 (papiers de maître Laternser) conservé au Palais de la Paix à La Haye. Cité par Alfred de Zayas dans son ouvrage intitulé : The Wehrmacht War Crimes Bureau, 1939-1945 (University of Nebraska Press, 1995), p. 223.
[15] Voy. V. Reynouard, « Aujourd’hui l’exposition Reemtsma ; demain le Centre de la mémoire d’Oradour ? » publié dans Nouvelle Vision, n° 2, 16 décembre 1999, pp. 106-7.
[16] Voy. G. Aubrey Dixon et Otto Heilbrunn, La guerre sur le front russe. Guérilla et Contre-Guérilla. Préface du général de corps d’armée sir Reginald F.S. Denning (éd. Charles-Lavauzelle & Cie, Limoges-Nancy, 1956), p. 141.
[17] Voy. le Journal de von Hassel, cité par G. Aubrey Dixon et Otto Heilbrunn, op. cit., p. 141.
[18] « La population civile a été fusillée et le village complètement détruit par le feu » déclare le compte rendu de l’opération (Ibid., p. 135).
[19] Voy. Raul Hilberg, La destruction des juifs d’Europe (éd. Fayard, 1988), p. 251.
[20] Cité par Robert Faurisson dans les Annales d’Histoire Révisionniste, n° 8, printemps 1990, p. 81, note 7.
[21] Voy., par exemple, http://www.7sur7.be, texte intitulé : « Analyse d’ossements trouvés près de l’avion de Steve Fossett ».
[22] Voy. le communiqué de l’Agence France-Presse, rédigé par Guy Clavel, 21 octobre 2008 (http://cyberpresse.ca). Pour rédiger ce passage, je me suis également fondé sur l’article de Romain Pigeaud : « Les énigmes d’une catacombe romaine » (http://scienceshumaines.com), un autre article intitulé : « Les catacombes ne sont pas celles que vous croyez » (http://culture.france2.fr) ainsi qu’un texte ayant pour titre : « Les fouilles de Saints-Pierre-et-Marcellin » (http://lewebpedagogique.com).
[23] Voy. Paleobios, 1988, vol. 4, n° 2-3, pp. 101-123.
[24] Voy. J. K. Zawodny, Katyn : massacre dans la forêt (éd. Stock, 1971), pp. 42-3.
[25] Voy., par exemple, Mémoire des camps (éd. Marval, 2001), pp. 12 et 13.
[26] Voy. Stéphane Bruchfeld et Paul A Levine, « Dites-le à vos enfants ». Histoire de la Shoah en Europe, 1933-1945, (éd. Ramsay, 2000), p. 112 ; col. A.
[27] Voy. S. Wiesenthal, Le livre de la mémoire juive (éd. Stock, 1986), p. 252, col. B.
[28] Voy. Raul Hilberg, La destruction des juifs d’Europe (éd. Fayard, 1988), pp. 265-6.
[29] Sur ce (prétendu) massacre, voy. également R. Hilberg, op. cit., p. 260.
[30] Voy. John C. Ball, La preuve par la photographie aérienne (éd. VHO), pp. 106-108.
[31] Dans le Livre de la mémoire juive, les auteurs parlent de 28 000 victimes (op. cit., p. 135, col. B). Nouvelle preuve que les estimations données dans la littérature officielle sont hautement fantaisistes.
[32] Voy. S. Wiesenthal, op. cit., p. 283.
[33] « Derrière le “Cimetière juif” à Simféropol, on pouvait voir des femmes fusillées avec des petits enfants » (voy. S.P. Melgounov, op. cit., p. 79).