Les spectacles sous Hitler

 

Question

Vous affirmez que le national-socialisme a supprimé les spectacles de mauvais goût comme ceux qu’Ambroise Got avait pu voir sous la république de Weimar[1]. Pour cela, il a dû prendre des mesures, c’est-à-dire édicter des textes de lois, des directives. Mais vous n’en citez aucune, ce qui fragilise votre exposé. Pourriez-vous combler cette lacune ?

Réponse

Le 15 mai 1935, le gouvernement national-socialiste promulgua une loi qui instituait un statut général pour tous les théâtres du Reich[2].
Contrairement à ce qu’on a pu prétendre, ce texte n’avait pas été rédigé dans le but de mettre les scènes en coupe réglée. Les directeurs de théâtres avaient le droit de faire jouer les pièces qu’ils voulaient, mais le ministre de la Propagande pouvait intervenir pour interdire certains spectacles ou, au contraire, en maintenir certains autres (dans la mesure où un tel maintien pouvait être tolérable pour l’entrepreneur).

Pour le cinéma, les autorités procédèrent différemment. Elles créèrent une « corporation du cinéma » qui rassemblait les metteurs en scène, les producteurs, les techniciens et les acteurs. Lorsque le besoin s’en faisait sentir, le ministre de la Propagande réunissait la corporation pour lui donner des directives.
Une réunion de ce genre eut lieu par exemple le 14 décembre 1935 à Berlin[3]. Là encore, il ne s’agissait pas de mettre le 7ème art en coupe réglée, mais, tout d’abord, de rationaliser le travail afin d’obtenir des résultats meilleurs. J. Goebbels proposa par exemple :

La répartition de la production sur toute l’année, afin d’éviter l’encombrement et le travail hâtif en certaines saisons, suivi du chômage ;

L’interdiction, pour les producteurs, d’exiger que les directeurs de salle soient obligés de commander un film avant qu’il ne soit achevé, afin de diminuer les risques de commandes à l’aveuglette ;

L’interdiction de commencer un film avant que les rôles ne soient achevés et remis pour l’étude aux acteurs une semaine au moins avant les prises de vue ;

Le relèvement et l’étalement sur toute l’année de l’appointement des acteurs, cela afin qu’il leur soit possible de refuser toute production n’ayant pas un caractère artistique sérieux.

En 1935, la production du cinéma allemand se montait à 180 films par an, soit quinze par mois.
Lors de la réunion de décembre à Berlin, J. Goebbels déclara que chaque année, on comptait « 3 à 6 bons films », « le théâtre ne [pouvant] présenter des résultats aussi satisfaisants »[4].
En 1937, sur 95 films, « 3 [furent reconnus] recommandables pour leur haute valeur, 18 pour leur valeur artistique et 3 pour leur valeur raciale »[5]. Preuve que les nationaux-socialistes étaient loin de régenter le monde de spectacle, sans quoi ils auraient jugé bons la majorité des pièces et des films produits..

Finalement, la hausse du niveau moral des spectacles sous Hitler doit être recherchée moins dans les lois et les directives publiées à partir de 1935 que dans l’émigration d’une grande partie des individus qui, sous Weimar, concevaient, produisaient et mettaient en scène les pièces et les films sordides.
Ceux qui restèrent (il s’agissait des moins décadents) pensèrent trouver une voie de sortie en produisant des spectacles d’un goût toujours douteux mais à caractère patriotique, destinés à être joués dans les cérémonies nationale-socialistes. Sans doute supposaient-ils que le patriotisme excuserait le malséant. Ils se trompaient. Le 10 novembre 1935, J. Goebbels publia une note énergique qui dénonçait le « mauvais goût patriotique »[6].
Il ordonna un contrôle renforcé de tous les projets destinés aux cérémonies.

On aurait cependant tort d’en déduire que les nationaux-socialistes furent des puritains.
En décembre 1935, J. Goebbels affirma que la censure ne devait « pas être mesquine et se choquer d’une saine gaîté ». Et de préciser (en substance) :

Le national-socialisme ne veut pas d’une atmosphère de puritanisme. […] le cinéma ne doit pas être guindé et se lancer dans les tirades héroïques à jet continu. Le peuple va au cinéma pour se distraire. Les producteurs devront toujours penser qu’ils travaillent pour le peuple tout entier. Ils devront présenter la vie telle qu’elle est, mais avec un sincère optimisme[7].

Un an plus tard, lors d’une assemblée de la Chambre de la Culture, le ministre de la Propagande s’éleva «

Contre les hypocrites qui, sous prétexte de décence, prétend[ai]ent bannir de l’art une certaine sensualité »[8].

Le national-socialisme chercha toujours le juste équilibre..

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[1] Voir hitler_providence.htm le chapitre intitulé : « Réponse à une objection : le national-socialisme a-t-il favorisé la débauche ? »
[2] Voy., par exemple, le Hamburger Fremdenblatt du 16 mai 1935.
[3] Voy. la Deutsche Allgemeine Zeitung, 15 décembre 1935.
[4] Voy. le Bulletin périodique de la presse allemande, n° 455, p. 27, col. B.
[5] Ibid., n° 479, p. 35, col. A.
[6] Voy. le Völkischer Beobachter, 11 novembre 1935.
[7] Voy. le Bulletin périodique de la presse allemande, n° 455, p. 27, col. B.
[8] Voy. le Bulletin périodique de la presse allemande, n° 467, 9 novembre 1936, pp. 30-1.

 

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