L’éternel « deux-poids-deux-mesures » appliqué par les « bons » à la solde de Big Brother

Le Tribunal de Nuremberg ne s’intéressait qu’aux crimes des vaincus

La Justice internationale a toujours été créée sur mesure pour combattre ceux que Big Brother considère comme ses ennemis et eux seuls.

L’exemple du grand procès de Nuremberg (1945-1946) est flagrant.
Dans son article 1er, le Statut du Tribunal militaire international annexé à l’Accord de Londres du 8 août 1945 prévoyait la création d’une juridiction

Pour juger et punir […] sans délai, les grands criminels de guerre des pays européens de l’Axe (TMI, I, 11)

.. et eux seuls.

Cette précision était d’ailleurs rappelée dans l’article 6, qui définissait les différents crimes à juger et qui débutait ainsi :

Le Tribunal […] sera compétent pour juger et punir toute personne qui, agissant pour le compte des pays européens de l’Axe, aura commis, individuellement ou à titre de membre d’organisations, l’un quelconque des crimes suivants : […]. » (TMI, I, 12).

On le voit, il n’était pas question de juger les Alliés ; seuls ceux qui avaient œuvré « pour le compte des pays européens de l’Axe » étaient susceptibles d’être poursuivis.
Cette façon d’agir fut dénoncée à Nuremberg par l’avocat d’Hermann Göring. Le 4 juillet 1946, il déclara que le Statut du TMI était

en lui même une loi d’exception, par le fait qu’il a[vait] été créé uniquement à l’intention des membres des puissances de l’Axe » (TMI, XVII, 515).

Quelques minutes plus tard, il alla plus loin, lançant :

[…] la justice exige la modération et l’appréciation des arguments et des contre-arguments. Et c’est déjà ici que le procédé unilatéral employé uniquement contre les ressortissants des puissances de l’Axe viole l’idée de justice » (TMI, XVII, 517).

Un cas flagrant d’injustice

Certains naïfs pourront répondre que seuls les vaincus avaient commis des crimes de guerre.
Un simple exemple démontrera qu’ils se trompent : prenons le cas du respect des ambulances lors des batailles.

Pour le soixantième anniversaire du « Débarquement » (comprenez : l’invasion anglo-américaine), un ancien parachutiste allemand, August Goenninger, qui avait combattu contre les Américains dans la région de Carentan (Manche), est revenu sur les lieux.
A Sainte-Marie-du-Mont, son bataillon, pris dans un étau, avait été décimé. Lui était parvenu à fuir, mais une image s’est gravé dans sa tête :

Devant l’église, les corps des occupants d’une ambulance allemande gisaient, la gorge tranchée »[1].

Crime isolé ? Nullement : dans sa livraison de juin 2004, le magazine Avions a publié une intéressante lettre de lecteur. L’auteur, rappelle le comportement des Anglais contre les avions « sanitaires » allemands lors de la bataille d’Angleterre. On lit :

[…] la Luftwaffe disposait d’hydravions « sanitaires » chargés de repêcher les naufragés et arborant des marques civiles semblables [avion entièrement peint en blanc et arborant de grandes croix écarlates]. Cependant, dès le 1er juillet 1940, le He 59 D-ASAM de Seenot Kdo 3 fut abattu sur la Manche par la RAF. Les quatre aviateurs (un blessé grave) seront sauvés par un des navires du convoi. Dans son excellent ouvrage sur la Battle of Britain, Francis Mason signale en note :

Lors de son interrogatoire l’équipage allemand se plaignit amèrement du non respect de la Croix Rouge. L’action de Graham (le pilote victorieux) fut ultérieurement justifiée par un ordre interdisant aux hydravions ennemis de voler près des convois si ce n’est à leur propre risque.

Le 9 juillet, le D-ASUO du Seenot Kdo 1 fut attaqué à son tour par le 54 Sq. et contraint de se poser (équipage capturé). Le 11 juillet, un troisième Heinkel aurait été abattu par le 217 Sq. (équipage récupéré). Le 20 juillet, coup double ! Le D-AKAR du Seenot Kdo 1 fut victime du 601 Sq. (quatre tués) tandis qu’un autre He 59 de Seenot Kdo 4 était détruit (équipage également tué) par le 238 Sq. à environ 5 km de Cherbourg, sans que l’on invoque ici l’alibi d’un quelconque convoi. Rajoutons, en date du 27, le He 59 de Seenot Kdo 3 revendiqué par les 615 Sq. à dix miles au nord-est de Douvres.

L’accumulation de ces victoires faciles contre des appareils désarmés poussera à une législation tardive. Ainsi, l’ordre de l’Air Ministry n° 1254 daté du 29 juillet constate que

des avions ennemis portant des marques civiles et arborant la croix rouge ont récemment survolé des navires en mer près de la côte britannique et sont employés dans des buts que le gouvernement de Sa Majesté ne peut considérer comme assimilables aux privilèges généralement accordés à la Croix Rouge.

C’est sur la base de cette accusation unilatérale (cf. les actuelles « weapons of mass destruction » !) que le Ministère emploiera une formule hypocrite :

Le gouvernement de Sa Majesté désire accorder aux appareils sanitaires des facilités raisonnables pour le transport des blessés ou des malades (…). Il est cependant incapable de les garantir pour des appareils de ce type survolant des secteurs d’opération (…) ou proches des territoires britanniques ou alliés (…).

En clair, tant que les appareils sanitaires ou de sauvetage survolent des lieux où leur présence n’est nullement requise, tout va bien..[2]

L’auteur termine son développement sur ce sujet en écrivant :

[…] si l’adversaire avait promulgué un pareil ordre, il aurait été taxé automatiquement de « barbare ». Les Britanniques étant en 1945 dans le camp des vainqueurs, on s’empressa de jeter le manteau de Noé sur ces agissements..

Naturellement ! A Nuremberg, seuls les vaincus étaient au banc des accusés..

La situation perdure depuis Nuremberg..

Depuis 1945, la situation n’a pas changé. Aucun dirigeant ou militaire américain n’a été traduit devant la Justice internationale pour, entre autres, les crimes commis au Vietnam, le déchaînement de la guerre au Nicaragua ou le blocus criminel de l’Irak. Deux exemples récents viennent en outre renforcer notre point de vue :

- Dans l’affaire du Kosovo, des plaintes ont été déposées contre le président des USA. Aujourd’hui encore, elles semblent être totalement ignorées ; seul S. Milosevic - l’ultra nationaliste, le mauvais, le vaincu - a été traduit devant le Tribunal pénal international pour la Yougoslavie (avant de mourir dans des circonstances suspectes) ;

- En juin 2001, le sénateur belge libéral Alain Destexhe s’est fait le porte-parole de ceux qui demandaient une révision de la loi belge de « compétence universelle ». Dans un article publié par Le Soir, on apprit qu’il avait notamment demandé la mise en place de « garde-fous relatifs à la poursuite de chefs d’État en exercice protégés par une immunité » (voy. Le Soir, 21 juin 2001, p. 5).

Quels en étaient les motifs ?
Quelques lignes plus bas, le quotidien révélait que le sénateur « redout[ait] d’éventuelles poursuites contre le président George W. Bush ». Tel était donc la raison réelle de son initiative : modifier la loi pour empêcher qu’elle puisse servir contre les « bons ».

L’argument suprême qui premet le cynisme de Big Brother : « Moi, c’est différent.. »

Le 21 novembre 1945, dans son exposé préliminaire, le procureur général américain à Nuremberg, Robert H. Jackson, lança :


[…] il était et il est illégal de faire la guerre, quelle que soit l’importance de l’enjeu [TMI, II, p. 118].

Verra-t-on George W. Bush traîné devant un tribunal international pour avoir déchaîné la guerre en Irak ? Verra-t-on la « démocratie américaine » mise au pilori pour avoir mené depuis plus de 150 ans de très nombreuses guerres offensives (1846 : Mexique, 1855 : Panama, 1898 : Possessions espagnoles ; 1909 et 1912 : Nicaragua, 1911 : Honduras, 1914 : Mexique, 1915 : Haïti, 1916 : Saint-Domingue, 1916-1917 : Mexique, 1917 : Allemagne, 1926 : Nicaragua..) ? Naturellement non.
Car c’est bien connu, le plus fort dispose d’un joker ; il a le droit de dire : « Moi, c’est différent ».

Ainsi, n’allez pas accuser l’actuel président américain d’avoir mené une guerre offensive contre l’Irak.
Il vous répondra : « Je n’ai pas mené de guerre, je n’ai pas agressé l’Irak. J’ai juste usé de mon “droit d’ingérence politique” pour abattre le régime de Saddam Hussein ».

Certains m’accuseront d’exagérer. Ils se trompent.

Dans Le Monde du 18 avril 2003, on lit sous la plume de Patrick Jarreau :

Par une combinaison de stratégies imaginatives et de technologies avancées, nous redéfinissons la guerre sur nos bases, a déclaré M. Bush en tirant les enseignements des deux engagements militaires américains, en Afghanistan et en Irak, depuis les attentats du 11 septembre 2001. Il a insisté sur la possibilité dont disposent les forces américaines « de s’en prendre à un régime et non à une nation ». L’affirmation de ce nouveau droit d’ingérence, non pas humanitaire mais politique, est un avertissement adressé à toute la région[3].

Ce qui, en clair, signifie : « Avec nos armes modernes, nous pouvons frapper un pays au cœur afin de détruire ses structures gouvernementales. Agir ainsi, ce n’est pas faire la guerre, mais c’est - selon nos nouvelles définitions - user d’un droit d’ingérence pour renverser les régimes dictatoriaux ».

Toute la propagande des « bons » est là : elle consiste à modifier le sens des mots au gré des circonstances, afin de pouvoir dire, la main sur le cœur : « Nous, c’est différent, ce n’est pas condamnable ».

Quatre exemples flagrants

Afin d’illustrer d’avantage mon propos, je prendrai quatre exemples flagrants donnés par l’Histoire récente : le « revanchisme allemand », les expériences sur des cobayes humains, les bombardements et la lutte contre le « terrorisme ».

Le « revanchisme allemand »

Baldur von Shirach accusé d’avoir corrompu la jeunesse allemande

A Nuremberg, les vainqueurs reprochèrent aux vaincus d’avoir voulu « effacer la “honte” de l’Armistice », c’est-à-dire la défaite de 1918, et d’avoir, par là même, voulu une nouvelle guerre dont l’issue serait plus heureuse[4].
Cet esprit, inhérent à l’idéologie nationale-socialiste, ils l’auraient inculqué très tôt à la jeunesse[5], en la pénétrant de militarisme, de l’esprit de revanche et en lui apprenant des chants bellicistes violents.

Le 15 février 1946, le substitut du procureur général américain, le colonel Drexel A. Sprecher, accusa Baldur von Schirach d’avoir entrepris « activement la militarisation de la jeunesse allemande » (TMI, VI, p. 299) et d’avoir créé « chez les jeunes enfants un terrain favorable aux guerres d’agression » (Ibid., p. 292).

Pour l’un des procureurs généraux français, le peuple allemand, qui était « venu à la civilisation assez tard, au VIIIe siècle seulement », avait « régress[é] […] de plus de douze siècles » ; de « mauvais maîtres étaient venus, qui [avaient] réveillé ses passions primitives et rendu possible les atrocités […] »[6]

Quelques semaines plus tard, l’avocat général américain, Thomas J. Dodd, mentionna quelques chants de la Jeunesse hitlérienne tels que, « Les tambours résonnent à travers le pays » et « Déployez les bannières trempées dans le sang » (TMI, XIV, p. 486).
Il cita également le chant intitulé « Drapeau de la jeunesse » dont une parole était : « Nous sommes les soldats de l’avenir et tout ce qui est contre nous tombera devant nos poings.. ».

Dans son réquisitoire, enfin, le Ministère public anglais déclara :

Schirach a corrompu des millions d’enfants afin qu’ils deviennent ce qu’ils sont devenus réellement aujourd’hui, les instruments aveugles de cette politique meurtrière et dominatrice que [les nationaux-socialistes] ont menée » (TMI, XXII, p. 420).

B. von Shirach se défend

L’ancien responsable des Jeunesses hitlériennes se défendit avec vigueur contre toutes ces accusations.
En certaines occurrences, même, il contre-attaqua. Ainsi rétorqua-t-il à l’accusateur soviétique :

Permettez-moi de faire remarquer que l’entraînement militaire de la jeunesse allemande est bien inférieure à celui de la jeunesse soviétique (TMI., XIV, p. 546).

Visiblement décontenancé, celui-ci se contenta de répondre :

C’est là une comparaison hors de propos.

..puis il passa à autre chose.

De même répondit-il à l’avocat général américain qui l’accusait d’avoir promu les exercices de tir au sein de la jeunesse :

Je sais que la Suisse enseignait le tir de manière bien plus intensive que nous ; bien d’autres pays aussi (Ibid., p. 495)

.. ce que son contradicteur fut obligé de reconnaître[7]. Dans sa déclaration finale, l’accusé tint à réaffirmer son innocence :

Les principes et les buts de la communauté que notre jeunesse, par ses propres forces, a bâtis sous ma direction ont été l’amour de la patrie, allant jusqu’au sacrifice, la suppression des préjugés sociaux et de la haine de classe, l’hygiène rationnelle, l’entraînement par la marche, le sport et le jeu, l’encouragement de la formation professionnelle et en particulier le rapprochement de camaraderie avec la jeunesse des pays étrangers[8].

B. von Shirach aurait pu rappeler l’état d’esprit français de 1870 à 1914

B. von Schirach aurait cependant pu contre-attaquer bien plus efficacement s’il avait eu accès à une documentation plus large et notamment à une documentation française.

En effet, les vainqueurs de 1945, parmi lesquels figurait la France, étaient bien mal placés pour accuser les dignitaires allemands d’avoir voulu effacer la défaite de 1918 et d’avoir baigné la jeunesse dans une ambiance de revanche.
Car qu’avait donc fait la France de 1871 à 1914 ?

La carte postale jointe à cet article apporte un premier élément de réponse. Elle montre trois personnages. Un ramasse pieusement des os qu’il dépose dans un boite tapissée d’un drap blanc pendant qu’une femme éplorée baisse la tête. Elle est soutenue par un militaire qui regarde d’un air sévère.
La légende porte : « Les Morts de 1870. “Une postérité vengeresse sortira de nos os” »
C’est un appel caractérisé à la jeune génération pour qu’elle obtienne une revanche militaire afin d’effacer la défaite de 1870.. Or, je rappelle que dès 1871, la France vota une loi qui instituait le service militaire pour tous les Français de vingt à quarante ans[9]. En 1919, dans son discours à l’Académie française pour la réception de Louis Barthou, Maurice Donnay lança :

Cette loi donnait à la France une armée égale à l’armée allemande. […] ayant versé son sang, elle était toute prête à le répandre encore.
[…] quelques années encore après l’Année terrible [1871], toute la jeunesse croyait fermement que c’était elle qui reprendrait les chères provinces perdues […]. Ce fut alors l’étonnement et la déception de plus d’un jeune Français d’avoir traversé le service actif et fait l’apprentissage de la guerre sans que l’occasion se présentât pour lui d’en devenir l’ouvrier [Id.].

On le voit, dès les années 1880, la France préparait activement sa revanche, qu’elle concevait au prix d’une nouvelle guerre, et inculquait ce sentiment à sa jeunesse.

Poursuivons cependant : les trois cartes postales reproduites ci-après sont également révélatrices. Toutes datent de cette période. Sur la première, on lit :

J’y chanterai notre revanche,
J’y chanterai la délivrance,
De deux pauvres sœurs oppressées
Par le vainqueur maltraitées.

La deuxième est plus nette encore. L’empereur Guillaume II est présenté comme « barbare » et « parjure », deux Alsaciennes lancent un appel :

France, viens nous délivrer de ce Monstre détesté

et des soldats français en armes clament :

« Nous sommes prêts ! ! ! .

De façon évidente, ces cartes étaient des appels à la « revanche », c’est-à-dire à l’effacement de la défaite de 1871 par la reconquête de l’Alsace et de la Lorraine, ces « deux pauvres sœurs oppressées ». Or, cette reconquête ne pouvait se réaliser que par une nouvelle guerre plus heureuse, guerre à laquelle la jeunesse était prête.

Certains pourront me répondre que ces cartes postales ne reflétaient pas l’état d’esprit des autorités françaises. C’est faux.
Le 11 novembre 1918, le président de la république française, Paul Deschanel, lança du haut de la tribune :

La voilà donc enfin, l’heure bénie pour laquelle nous vivions depuis quarante-sept ans ![10].

La quatrième carte postale a été dessinée par le célèbre Hansi.
On y voit une jeune mère alsacienne qui tend à son petit garçon encore au berceau une poupée-soldat.
La légende porte : « Son premier jouet » (voir la carte postale).
Mieux encore que les « nazis » qui, eux, auraient inculqué le militarisme aux enfants à partir de 9 ans !

Enfin, pour répondre à l’accusation selon laquelle les paroles des chants de la Jeunesse hitlérienne étaient parfois violentes, parlant d’adversaires roués coups de poing et de « bannières trempées dans le sang », B. von Schirach aurait pu rappeler les poèmes et les chansons de Paul Déroulède, chantre français de la « revanche », dont voici un exemple :

Pour ravager comme une trombe
A gauche, à droite, en large, en long,
Sans qu’on puisse voir d’où ça tombe
Pour tout bousculer nom de nom,
Vive la bombe !
Vive la bombe !
Pour tout bousculer nom de nom !
Vivent la bombe et le canon[11].

« Nous, c’était différent.. »

On le voit, la volonté d’effacer une défaite militaire et de reconquérir les territoires perdus même au prix de la violence n’a pas attendu Hitler pour naître.
Mais là comme ailleurs, les vainqueurs de 1945 nous avertissent qu’il ne faut pas confondre. Lorsque la France parlait de « revanche », lorsqu’elle établissait le service militaire obligatoire, lorsqu’elle apprenait à ses jeunes générations qu’il fallait fixer le regard sur la « ligne bleue des Vosges », on nous explique que tout cela était légitime, puisque la guerre qu’elle préparait était une « guerre de droit »[12].

Mais lorsque, vingt ans plus tard, l’Allemagne voulut, à son tour, récupérer ses territoires perdus, qu’elle rétablit le service militaire, qu’elle réarma afin de redevenir une puissance enfin écoutée, qu’elle éduqua ses jeunes garçons pour qu’ils deviennent de bons soldats, les vainqueurs y virent la preuve que dès 1933, les comploteurs « nazis » se proposaient

de détruire ou d’affaiblir d’une façon permanente tous les autres pays voisins afin de s’assurer, en pratique, la domination de l’Europe et probablement du monde » (TMI, II, p. 118, réquisitoire de R. H. Jackson).

Les expériences sur des cobayes humains

Invoquées pour condamner universellement le national-socialisme

En 1945-46 à Nuremberg, les vainqueurs reprochèrent aux vaincus d’avoir mené des expériences sur des cobayes humains.

Des accusations similaires furent lancées dans des procès postérieurs, comme celui des « médecins d’Auschwitz ».

Dans le jugement prononcé solennellement le 1er octobre 1946 au nom de l’humanité, les Allemands furent reconnus coupables d’avoir, dans les camps, soumis les détenus à des « expériences cruelles » :

On effectuait […] différentes expériences concernant les hautes altitudes, la durée pendant laquelle des êtres humains peuvent vivre dans l’eau glacée, l’effet des balles empoisonnées et de certaines maladies contagieuses. Enfin, on expérimenta la stérilisation d’hommes et de femmes par les rayons X et par d’autres méthodes [TMI, I, p. 265].

A l’époque, dans certains milieux, ces expériences étaient jugées plus graves encore que les (prétendues) chambres à gaz homicides. Le 15 juin 1945, ainsi, le professeur Christian Champy écrivit, à propos des « cobayes humains du Struthof » :

De toutes les ignominies dont les Allemands se sont rendus coupables contre les déportés, et qui montrent quelle sauvagerie profonde le nazisme a pu faire reparaître, la pire est peut être celle […] provenant du camp du Struthof, près de Schirmeck[13].

Dans les années qui suivirent, toutefois, la chambre à gaz homicide prit une place prépondérante. Mais les « cobayes humains des nazis » restèrent largement utilisés afin de présenter le national-socialisme comme l’idéologie monstrueuse des temps modernes.

Dans son édition de 1973, ainsi, le livre mémorial du Struthof parla :

[des] expériences sur l’homme, en violation de toutes les lois de l’humanité, en violation du serment d’Hippocrate, expériences tentées à Dachau […], inoculation de maladies à Buchenwald (typhus) […], expériences de résistance au gaz (notamment au gaz moutarde) pratiquées au Struthof, expériences alimentaires, mais aussi expériences pour « l’amélioration » de la race (castration, stérilisation, etc.) pratiquées à Auschwitz, expériences sur les os, les muscles, sur les « lapins » (1) [note (1) : On désignait ainsi les Polonaises qui servirent de cobayes] de Ravensbrück. En résumé, expériences où se manifestaient surtout le mépris de l’homme et le sadisme[14].

En 1979, Dino de Regeriis publia une photographie du Dr Mengele en l’accompagnant de la légende suivante :

Le docteur Joseph Mengele, médecin à Auschwitz où il fit de terribles expériences sur les Juifs [15].

Dix ans plus tard, la FNDIRP publia un cliché qui montrait trois petits enfants amaigris ; la légende portait :

« Enfants déportés qui servaient de cobayes aux médecins SS »[16].

Les révélations des années 1990-2000 sur les expériences humaines pratiquées par les « bons »

Dès 1946, pourtant, l’avocat de la SS à Nuremberg, Maître Pelckmann, avait rappelé que les Américains recourraient eux aussi aux cobayes humains et que ces cobayes mourraient parfois lors des expériences[17]. Mais sa voix avait été rapidement couverte.
Puis vint 1993. Cette année-là - stupeur ! - il apparut que Maître Pelckmann n’avait même pas entrevu le haut de l’iceberg.
Les médias révélèrent que dans les années 40 et après, des scientifiques russes et américains avaient conduit des expériences à grande échelle sur des cobayes humains.
Le 25 mars 1993, l’hebdomadaire VSD informa ses lecteurs que, pendant la seconde guerre mondiale, le Pentagone avait exposé

entre 8 000 et 10 000 soldats américains de 17-18 ans au gaz moutarde, pour tester l’efficacité des vêtements protecteurs et des masques à gaz » (p. 49).

Ceux qui refusaient l’expérience étaient menacés de quarante ans de prison et de haute trahison s’ils parlaient (Id.).

Il n’y avait donc pas eu que les Allemands au Struthof !

Dans les mois qui suivirent, des révélations en cascade survinrent. Le 29 décembre 1993, la presse française indiqua que, dans les années 50, les expériences sur les cobayes humains s’étaient multipliées :

- Des adolescents handicapés mentaux du Massachusetts avaient reçu des repas radioactifs ;
- 751 femmes enceintes du Tennessee avaient reçu, sans le savoir, des pilules radioactives qui leur administrait une dose trente fois supérieure à la moyenne. Bien que les enfants n’aient pas tous été suivis par la suite, les autorités savaient que trois d’entre eux étaient morts jeunes de cancer : deux à l’âge de 11 ans, un à l’âge de cinq ans.
- Près de 200 nouveaux-nés de cinq États américains avaient reçu des doses d’iode 131, un isotope radioactif.

Pire : un rapport révéla qu’entre 1948 et 1952 au Nouveau Mexique, dans le Tennessee et dans l’Utah, lors d’essais tenus secrets, des contaminations radioactives de l’atmosphère avaient été délibérément provoquées afin d’observer les effets sur les populations.

Dans les années 60, ce genre d’expériences continua :

- Des patients hospitalisés reçurent de petites doses de plutonium afin d’en suivre le devenir dans l’organisme. Il s’agissait souvent de grands malades déjà condamnés. Mais tous ne pouvaient être classés dans cette catégorie. Ainsi cet ouvrier qui s’était blessé à la jambe et qui y reçut une dose de plutonium 239. Trois jours plus tard, sa jambe fut coupée et emportée par les chercheurs. L’homme survécut 44 ans.
- En 1963, 131 détenus de l’Oregon et de Washington reçurent une forte dose de rayons X aux testicules afin d’observer les effets sur la spermatogenèse. Par la suite, les détenus de L’Oregon furent vasectomisés[18].

On aurait pu croire que les révélations allaient cesser. Erreur.
Le 11 octobre 2002, Libération publia un article intitulé : « Quand Washington testait ses bacilles ». On y apprenait qu’entre

1962 et 1973, le gouvernement américain [avait] testé des armes chimiques sur sa propre population et sur d’autres civils au Canada et en Grande-Bretagne.

A Hawaii, ainsi, des avions avaient pulvérisé le bacille globigii, très proche du charbon et capable d’engendrer des inflammations aiguës, telles des otites et des méningites. L’objectif était d’ « évaluer l’efficacité des systèmes de réponse et de détection ».
D’après William Winkenwerder, du ministère de la Défense pour les affaires de santé, « des milliers de personnes ont pu être exposées », sans qu’on n’ait toutefois pu prouver un seul décès.

Les « bons » sont excusés car « c’était différent »

En toute logique, les autorités américaines auraient dû être sévèrement condamnées pour ces faits, de la même façon que certains Allemands l’avaient été un demi-siècle auparavant. Mais non !

En 1993-1994 puis en 2002, la presse qui rapporta ces révélations s’abstint de tout jugement et de toute condamnation. Ainsi, bien que Science & Vie ait intitulé son article : « Le scandale des cobayes humains », l’étude se terminait brutalement, après l’évocation des essais nucléaires français à Tahiti et le secret entretenu autour des effets sur les populations polynésiennes.

A l’époque, le directeur de l’INSERM, Axel Kahn, justifia cette absence de condamnation.
Interrogé par la télévision, il expliqua qu’

un conflit existait entre ce qui a été fait dans les camps de la mort [allemands] et qu’on ne veut plus jamais revoir et ce qui a toujours été fait : pour soigner, il faut expérimenter sur des prisonniers ou sur des fous »[19].

A. Khan ressortait donc le sempiternel argument, le joker des « bons » lorsque leurs propres crimes en viennent à être découverts : « Ce n’est pas pareil. On ne peut pas comparer. »

Dans le cas présent, la dialectique est la suivante : lorsque les « nazis » expérimentaient sur des cobayes humains, il s’agissait d’ « expériences pseudo-scientifiques »[20], preuve de « mépris de l’homme et de sadisme », « fruit de la pensée des dirigeants de la conspiration nazie »[21] donc hautement condamnables ; lorsque les « bons » expérimentaient sur des cobayes humains, il s’agissait d’une démarche scientifique traditionnelle (« ce qui a toujours été fait ») élaborée « pour soigner », donc nullement condamnable.

Pour plus d’informations sur la médecine, l’euthanasie et les expériences médicales sous Hitler, voir l’article « Euthanasie, stérilisation et cobayes humains sous Hitler« .

Les bombardements

A Nuremberg, on reproche aux accusés les bombardements de Leningrad

Venons-en maintenant aux bombardements. Pendant le siège de Leningrad qui dura plus de deux ans, les Allemands pilonnèrent la ville à de multiples reprises. D’après les Soviétiques, 20 000 personnes seraient mortes sous les bombes. A Nuremberg l’accusation parla de « bombardements sauvages », de « forfaits » et « d’atrocités »[22].

Les bombardements massifs des Alliés qualifiés de simples « mesures militaires »

Soixante ans plus tard, lors d’une conférence en Italie, V . Reynouard dénonça les bombardements massifs sur l’Allemagne, l’engloutissement de dizaines de villes et la mort de centaines de milliers de civils. Dans les semaines qui suivirent, la revue « antifasciste » Searchlight qualifia son exposé d’« apologie du fascisme nazi à travers la dénonciation des mesures militaires grâce auxquelles les Alliés ont mis de Troisième Reich à genoux »[23].

Les morts ne sont pas tous égaux

Aujourd’hui, ainsi, il ne faut pas confondre : les bombardements alliés des villes allemandes qui ont causé des centaines de milliers de victimes sont de simples « mesures militaires » non susceptibles d’être jugées ; en revanche, les bombardements allemands sur Leningrad qui ont causé 20 000 victimes ( ?) sont autant de « bombardements sauvages », à ranger dans la catégorie des « forfaits », et des « atrocités » jugés au tribunal de l’humanité.

Toujours à propos des bombardements, rappelons qu’en décembre 2002, l’historien allemand Jörg Friedrich a publié un ouvrage, Der Brand, qui évoque l’engloutissement des villes allemandes par les Alliés pendant la seconde guerre mondiale[24]. A cette occasion, Les Dernières Nouvelles d’Alsace ont publié un article qui vaut la peine d’être lu.

L’auteur, Céline Le Prioux, écrit :

Jörg Friedrich jouissait d’une certaine renommée grâce à ses recherches sur les crimes de guerre et les crimes d’État du national-socialisme. Il s’est cette fois attiré de vives critiques, notamment de la part de la presse britannique [Les Dernières Nouvelles d’Alsace.

C’est clair : lorsqu’on évoque les « crimes nazis », on fait un travail estimable (qui apporte la « une certaine renommée ») ; en revanche, lorsqu’on évoque les « crimes alliés », on fait un travail critiquable.

L’auteur cite ensuite Der Spiegel d’après lequel, jusqu’ici :

le culte de la mémoire [des morts allemands] restait entre les mains des extrémistes de droite et des revanchards.

Là encore, c’est clair : ceux qui entretiennent le culte des « martyrs de la Résistance » ou des « Juifs victimes des nazis » sont des gens qui, dans un esprit de strict neutralité politique et religieuse, luttent pour un monde meilleur ; en revanche, ceux qui entretiennent le culte des « victimes des Alliés » sont des « extrémistes de droite » dont l’objectif final est d’obtenir une revanche, donc de perpétuer la violence.

C. Le Prioux termine en citant un historien allemand, Hans-Ulrich Wehler, qui déclare :

Le débat [sur les bombardements alliés], pour nécessaire qu’il soit, ne doit pas mener à un culte des victimes.

Cette simple phrase résonne comme un aveu :

1°) Les « crimes nazis » ne sauraient donner lieu à des « débats » ; même si les preuves de leur existence font défaut, tout est acquis, jugé, condamné. Point final. En revanche, dès qu’il est question des « crimes alliés », même si leur réalité ne fait aucun doute, même si la volonté criminelle est établie[25], rien n’est acquis, ni jugé et encore moins condamné. Tout doit se limiter dans la sphère du « débat », autrement dit : tout doit rester à jamais impuni..
2°) En acceptant que les victimes des « crimes nazis » reçoivent un culte, on les reconnaît de fait comme des martyrs. En refusant que les victimes des « crimes alliés » en reçoivent un, on les considère comme de simples scories à oublier. Tous les morts ne sont donc pas égaux : suivant qu’ils ont été tués par les « méchants » ou par les « bons », ils sont soit des martyrs, soit des scories.

Israël bénéficie de ce « deux-poids-deux-mesures »

Le précédent de la « Résistance » sous l’Occupation

L’Allemagne effectue des représailles

Sans surprise, les autorités Israël utilisent largement cette dialectique afin de justifier les actions menées contre les Palestiniens.
Pour bien le comprendre, il faut une nouvelle fois s’intéresser au cas du Troisième Reich et à la façon dont les hauts dignitaires nationaux-socialistes ont été jugés. En septembre 1939 , la France déclara la guerre à l’Allemagne. En juin 1940, elle dut solliciter un armistice. Malgré tout ce que put alléguer Charles De Gaulle, celui-ci fut signé par deux gouvernements légaux ; il avait donc force de loi. L’article 10, alinéa 3, stipulait :

Le gouvernement français interdira aux ressortissants français de combattre contre l’Allemagne au service d’États avec lesquels l’Allemagne se trouve encore en guerre. Les ressortissants français qui ne se conformeraient pas à cette prescription seront traités comme des francs-tireurs.

Ce texte ne laissait nulle place au doute : un ressortissant français qui prenait les armes contre l’Allemagne devenait hors la loi. Et s’il perpétrait des attentats, il devenait un « terroriste ».

A partir de 1941, les autorités d’occupation se heurtèrent à des groupes de maquisards toujours plus nombreux et structurés. Non seulement des soldats, mais aussi des membres du personnel administratif et médical étaient tués dans des embuscades ou dans des attentats.
Que fit l’Allemagne ? Elle traqua les « terroristes » - tout comme les autorités françaises avaient traqué les membres des corps francs allemands responsables d’attentats lors de l’occupation de la Ruhr en 1923[26] - et exerça par endroits des représailles (exécution d’otages..).

A Nuremberg, l’Accusation fustige les représailles allemandes

Puis vint la défaite de l’occupant et le jugement de ses chefs. Avec aplomb, le vainqueur allégua faussement que les représailles violaient le droit international, et plus particulièrement à l’article 50 de la Convention de la Haye sur la guerre sur terre[27].
Aussi l’accusé Keitel fut-il condamné à mort et pendu notamment pour sa responsabilité dans la lutte contre les réseaux de maquisards[28].
Avec plus d’aplomb encore, le vainqueur prétendit que la lutte contre les « patriotes » avait servi de simple prétexte pour instaurer partout un régime de terreur et d’extermination conforme à la « doctrine nazie ».
Le 15 mars, ainsi, le procureur général américain Robert H. Jackson lança :

Rien ne peut justifier l’instauration d’un régime de terreur sous le prétexte de représailles [29].

De son côté, le procureur général adjoint français Charles Dubost s’appuya sur une liste des principales « atrocités nazies » commises en France et ailleurs (villages investis - afin de détruire des centres de Résistance -, sanctuaires profanés, civils abattus sans jugement, déportations, tortures, viols[30]..) pour déclarer que les nationaux-socialistes avaient mis en place dans les territoires sous leur contrôle une politique générale de « terrorisme » et d’ « extermination »[31].
Deux semaines auparavant, le procureur général François de Menthon avait lancé :

Ces crimes [« emprisonnements arbitraires, mauvais traitements, déportations, meurtres, assassinats commis par les Allemands dans les pays occupés »] découlent directement de la doctrine nazie en ce qu’ils témoignent chez les dirigeants du Reich d’un mépris absolu de la personne humaine, de l’abolition de tout sentiment de justice et même de pitié […]. Tous ces crimes se rattachent à une politique de terrorisme […]. Beaucoup de ces crimes se rattachent en outre à une volonté d’extermination [TMI, V, p. 402].

Charles Dubost alla même jusqu’à accuser l’Allemagne d’avoir

tenté de tuer jusqu’à l’âme et à l’esprit de la France et des autres nations occupées de l’Ouest » (TMI, VI, pp. 439-440).

Ainsi, la lutte contre la « Résistance » était-elle présentée au monde comme une preuve du « mépris absolu de la personne humaine », d’une politique de « terreur » et d’une « volonté d’extermination ».

Quand Israël combat, « ce n’est pas pareil.. »

Soixante ans après ces condamnations lancées au nom de l’humanité, Israël continue à occuper des territoires au mépris des résolutions de l’ONU.
Début 2003, Ariel Sharon a été reconduit par une majorité des électeurs israéliens. Ariel Sharon est le symbole de la fermeté absolue en politique. Dans sa lutte contre le « terrorisme », il a choisi de répondre aux coups par les coups, même s’il faut pour cela violer le droit international.

Ses soldats franchissent les lignes de démarcation, investissent les villes et les villages susceptibles d’abriter des « terroristes », détruisent les maisons, emprisonnent des civils, tuent les suspects sans autre forme de procès, quand il ne s’agit pas d’innocents touchés par erreur..
Comment ses partisans décrivent-ils son action ? Ouvrons la revue Contact J de février 2003. Dans un éditorial intitulé : « Sharon : le deuxième acte », on lit :

Avec une détermination qui ne s’est émoussée à aucun moment de son mandat [précédent], il [A. Sharon] a tracé les grandes lignes d’une politique qui seule convenait à la situation. Montrer sa volonté irrésolue face à la violence sur le terrain. Montrer qu’on ne cède rien par la force. Montrer qu’on peut résister à toutes les pressions américaines ou internationales : il suffit de croire avec une profonde conviction à la vertu suprême du droit d’un état à se défendre.
On a eu beau critiquer ses choix, sa dureté, ses répliques sans pitié, il n’a nullement dévié de son obligation d’assurer la sécurité de ses citoyens.
Pour y arriver, il fallait prendre des initiatives audacieuses qui mettaient le droit international à mal. Il a revendiqué le droit de poursuite, ne pas s’arrêter aux lignes de démarcation, ne pas accepter les sanctuaires, identifier et abattre les responsables des tueries. Il fallait investir les villes palestiniennes car elles étaient les foyers du terrorisme, il fallait réduire le chef des palestiniens à un non-interlocuteur.
Il fallait aussi donner aux citoyens israéliens la revanche des innocentes victimes des bombes humaines palestiniennes, sinon c’était toute la notion d’état de droit qui allait en Israël être compromise, avec ses dangereuses conséquences[32].

On le voit, dès qu’il s’agit d’Israël, tout devient radicalement différent.

Violer le droit international, franchir des lignes de démarcation, investir des villes, ne pas accepter les sanctuaires, abattre sans jugement n’est plus la preuve ni d’un mépris de la personne humaine, ni d’une politique de terreur et d’extermination. Non, c’est la simple mise en pratique de « la vertu suprême du droit d’un état à se défendre ».
Quant à venger les innocentes victimes, c’est préserver « la notion d’état de droit ».

On me dira que cette dialectique est celle d’un partisan d’A. Sharon. C’est vrai, mais la passivité (voire la complicité) de la communauté internationale démontre qu’elle est généralement acceptée, notamment par les Etats-Unis, le France et l’Angleterre, ces trois pays qui ont si sévèrement condamné la doctrine nationale-socialiste en matière de répression du terrorisme.

Conclusion

Dans sa déclaration finale au procès de Nuremberg H. Göring, dénonça le deux-poids-deux-mesures adopté tout au long des audiences :

Dans son réquisitoire, M. Jakson indique que les États signataires se trouvent encore en état de guerre avec l’Allemagne et qu’il n’y a qu’un simple armistice, par capitulation sans condition. Mais le Droit international est unique. La même chose doit être valable pour les deux côtés. Si donc tout ce qui se passe actuellement chez les autorités d’occupation en Allemagne est admissible du point de vue du Droit international, auparavant l’Allemagne était tout au moins dans la même situation à l’égard de la France, de la Hollande, de la Belgique, de la Norvège, de la Yougoslavie et de la Grèce. Si aujourd’hui la Convention de Genève n’a plus de valeur vis-à-vis des Allemands, si actuellement, dans toutes les parties de l’Allemagne, l’industrie est démontée et si d’autres valeurs, dans d’autres domaines, peuvent être envoyées dans des États victorieux, si aujourd’hui la fortune de millions d’Allemands peut être saisie, si l’on peut agir contre la liberté et la propriété des Allemands, de telles mesures de la part de l’Allemagne dans les pays cités plus haut ne peuvent avoir été prises à l’encontre du Droit international et ne peuvent pas avoir été criminelles [TMI, XXII, p. 394].

H. Göring oubliait cependant que les vainqueurs avaient adopté une dialectique qui leur permettait de contourner cette difficulté. Elle consiste à qualifier les mêmes actes et les mêmes pensées de façon très différente suivant qu’ils sont repérés chez les « bons » ou chez les « mauvais ».

L’important n’est donc pas le mot utilisé pour décrire l’acte, mais l’explication qui suit et qui diffère radicalement suivant le camp qui est visé. Chez les « bons », tout est justifié ou déclaré excusable. Les cas les plus difficiles sont tout au plus sujets à « débats ». Chez les « mauvais », en revanche, tout est injustifiable, inexcusable. Depuis 1945, ainsi, un lexique existe, imprimé nulle part mais présent dans toutes les têtes, qui permet de décrypter suivant le contexte. L’exposé ci-dessus permet d’en découvrir une partie que voici :

Bombardements.

1°) S’ils sont perpétrés par les « nazis » : actions « sauvages » à ranger dans la catégorie des « forfaits » et des « atrocités » jugés au tribunal de l’humanité. N’ont-ils pas causé la mort de 20 000 personnes à Leningrad ?
2°) S’ils sont perpétrés par les Alliés : simples « mesures militaires grâce auxquelles les Alliés ont mis de Troisième Reich à genoux » (Searchlight). Ils ont certes causé plusieurs centaines de milliers de morts, mais tout cela est sans importance, car les victimes ne se valent pas (voy. « Victimes », 2°).
Voy. aussi « Crimes de guerre et contre l’humanité ».

Crimes de guerre et contre l’humanité.

1°) S’il s’agit de crimes « nazis » : actes définitivement établis, incontestables (si les preuves manquent, des lois pallient ce vide) et jugés. Doivent être sans cesse rappelés pour une condamnation définitive du « nazisme ». Les travaux qui le permettent sont estimables ; ils apportent une certaine renommée à ceux qui les publient.
2°) S’il s’agit de crimes alliés : actes très peu connus et jamais jugés à propos desquels on ne peut que débattre. Le mieux est toutefois de jeter sur eux un voile pudique, sachant que les victimes devront tomber dans l’oubli (voy. « Victimes », 2°). Ceux qui les révèlent sont l’objet de vives critiques.

Expériences sur des cobayes humains.

1°) Si elles sont effectuées par les « nazis » : « expériences pseudo-scientifiques » qui prouvent le « mépris de l’homme » et de « sadisme » des « nazis ». Doivent être sans cesse rappelées au grand public afin de condamner radicalement le « nazisme ».
2°) Si elles sont effectuées par des chercheurs américains : démarche scientifique traditionnelle dont l’objectif est de faire avancer la science médicale. Ne sont donc nullement condamnables, même s’il vaut mieux les cacher au grand public.

Lutte contre le terrorisme et représailles.

1°) Si elles est sont organisées par les « nazis » : les « représailles » sont un simple prétexte qui sert à couvrir « une politique de terreur à l’égard de l’ensemble des nations subjuguées » ainsi qu’une « politique d’extermination à l’encontre de catégories entières de citoyens inoffensifs » (Charles Dubost). Elles sont donc la preuve du « mépris absolu de la personne humaine » affichée par les « nazis ».
2°) Si elles sont organisées par les « bons », comme Israël : mise en pratique de « la vertu suprême du droit d’un état à se défendre » ; actions pour préserver « la notion d’état de droit ».

Victimes.

1°) Victimes des « nazis » : martyrs auxquels il faut vouer un culte « pour ne jamais oublier ».
2°) Victimes des « bons » : scories à oublier. Car elles n’ont aucune valeur pédagogique, puisqu’il s’agit de victimes collatérales d’un combat pour la défense de la civilisation contre un peuple qui avait « régressé de plus de douze siècles » (Charles Dubost). Ceux qui leur vouent un culte sont des « extrémistes » et des « revanchards » (Der Spiegel).

Volonté d’effacer une défaite militaire et de reconquérir des territoires perdus.

1°) Si cette volonté est affichée par la France (ou par une démocratie quelconque) : souci légitime de faire triompher le droit momentanément éclipsé par la victoire des barbares (voy. le cas de l’Alsace-Lorraine en 1871).
2°) Si cette volonté est affichée par l’Allemagne : symptôme manifeste d’un désir « de détruire ou d’affaiblir d’une façon permanente tous les autres pays voisins afin de s’assurer, en pratique, la domination de l’Europe et probablement du monde » (R. H. Jackson).

Depuis l’Afghanistan et l’Irak, ce lexique immatériel s’est encore étoffé. La notion de « guerre d’agression » y est maintenant incluse :

Guerre d’agression.

1°) Si elle est menée par les « nazis » : violation manifeste du Droit international qui démontre une volonté diabolique d’hégémonie.
2°) Si elle est menée par les USA ou par une coalition ayant à sa tête les USA : simple usage du « droit d’ingérence politique » destiné à libérer des pays du régime tyrannique qui les oppresse.

J’ajoute qu’en revendiquant le droit « de s’en prendre à un régime et non à une nation », G. W. Bush n’a guère innové ; il s’est directement appuyé sur.. le Statut du Tribunal de Nuremberg.

Jusqu’en 1945, en effet, il était admis que chaque État était souverain, ce qui impliquait son droit traiter librement ses nationaux, sans avoir de comptes à rendre à l’étranger.
Quelques exceptions furent faites au XIXème siècle.

En 1827, ainsi, la France, l’Angleterre et la Russie intervinrent contre l’Empire ottoman, afin de faire cesser les exactions contre la minorité grecque qui souhaitait l’autonomie.
En 1876, la Russie déclara la guerre à la Turquie suite à la répression sanglante par les Ottomans de la grande révolte bulgare de mai 1876 (15 000 morts).
Citons également les interventions en Arménie puis en Crète dans les années 1891 et 1896 pour faire cesser les atrocités commises dans ces régions.

Jamais, cependant, ces interventions n’avaient entraîné la chute du pouvoir en place ou la mise en procès d’un quelconque haut dignitaire vaincu. Par exemple, le traité signé en 1878 après la victoire russe sur les Turcs avait démantelé l’Empire ottoman d’Europe, la Bessarabie revenant à la Russie, la Roumanie, la Serbie et le Monténégro accédant à l’indépendance et la Bulgarie devenant une principauté autonome. Mais ni le sultan Abdûl-Amid II, ni ses ministres, ni ses militaires n’avaient été traduits en justice pour les « atrocités » commises en Bulgarie.

La Convention de La Haye du 18 octobre 1907 n’apporta aucun changement fondamental. Bien qu’elle édictât des « lois » qui régissaient la guerre sur terre, elle ne prévoyait aucune sanction contre les dignitaires d’une Puissance qui les auraient violées. Seul l’État pouvait, le cas échéant, être condamné à verser une « indemnité ».
L’article 3 stipulait :

La partie belligérante qui violerait les dispositions du dit Règlement sera tenue à l’indemnité, s’il y a lieu. Elle sera responsable de tous les actes commis par les personnes faisant partie de sa force armée.

En 1919, les vainqueurs innovèrent et voulurent aller plus loin. L’article 227 du Traité de Versailles (partie VII, « Sanctions ») mit Guillaume II de Hohenzollern « en accusation publique » « pour offense suprême contre la morale internationale et l’autorité sacrée des traités ». Il prévoyait :

Un tribunal spécial sera constitué pour juger l’accusé en lui assurant les garanties essentielles du droit de la défense. Il sera composé de cinq juges, nommés par chacune des cinq Puissances suivantes, savoir : les Etats-Unis d’Amérique, la Grande-Bretagne, la France, l’Italie et le Japon.
Le Tribunal jugera sur motifs inspirés des principes les plus élevés de la politique entre les nations avec le souci d’assurer le respect des obligations solennelles et des engagements internationaux ainsi que de la morale internationale. Il lui appartiendra de déterminer la peine qu’il estimera devoir être appliquée.
Les Puissances alliées et associées adresseront au gouvernement des Pays-Bas [où Guillaume II s’était réfugié après son abdication] un requête le priant de livrer l’ancien empereur entre leurs mains pour qu’il soit jugé.

Allant plus loin, et violant ainsi l’article 3 de la Convention de La Haye, le vainqueur affirmait son droit

de traduire devant des tribunaux militaires les personnes accusées d’avoir commis des actes contraires aux lois et coutumes de la guerre (art. 228 du Traité de Versailles).

L’Allemagne, quant à elle, devait :

livrer aux Puissances alliées et associées, ou à celle d’entre elles qui lui en adresser[ait] la requête, toutes personnes qui, étant accusées d’avoir commis un acte contraire aux lois et coutumes de la guerre, lui seraient désignées […] [Id.].

Ces innovations restèrent toutefois sans effet pratique. En particulier, Guillaume II ne fut ni extradé, ni jugé. Il mourut aux Pays-Bas en 1941.

Mais tout changea en 1945. Soucieux d’éviter les ratés de 1919[33], le 8 août, l’Accord de Londres signé par les USA, la France, l’Angleterre et l’URSS donna naissance à un Tribunal Militaire International qui serait chargé de

juger et punir de façon appropriée et sans délai, les grands criminels de guerre des pays européens de l’Axe (art. 1er du Statut du TMI).

Trois genres de crimes nouveaux étaient visés : les crimes contre la Paix, les crimes de guerre et les crimes contre l’Humanité (art. 6). En vertu , donc, d’un nouveau droit international, les vainqueurs s’apprêtaient à juger des personnes physiques, sans distinction de rang ou grade[34].

Mais le caractère exorbitant du Statut apparaissait plus particulièrement à l’article 6. Le paragraphe c prévoyait en effet que les «

crimes contre l’Humanité commis avant ou pendant la guerre seraient reconnus comme tels, qu’ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés »

Pour la première fois, donc, un droit criminel international venait supplanter le droit interne des pays.
Enfin, le dernier aliéna de l’article 6 stipulait :

Les dirigeants, organisateurs, provocateurs ou complices qui ont pris part à l’élaboration […] d’un plan concerté pour commettre l’un quelconque des crimes ci-dessus définis sont responsables de tous les actes accomplis par toutes personnes, en exécution de ce plan.

En conséquence, un dirigeant et ses ministres pouvaient désormais être traduits en justi-e — ce qui impliquait leur renversement préalable - s’ils mettaient en pratique une politique non conforme une prétendue morale de l’Humanité codifiée dans un nouveau droit international.
Les artisans du procès de Nuremberg l’affirmèrent d’ailleurs sans ambages. Dans son réquisitoire prononcé le 26 juillet 1946, ainsi, le procureur général britannique Sir Hartley Shawcross déclara :

Le Statut du Tribunal […] donne un avertissement pour l’avenir. Je dis et je répète qu’il donne un avertissement aux dictateurs et aux tyrans qui apparaissent sous le masque de l’État : si, pour multiplier ou favoriser leurs crimes contre la communauté des nations, ils avilissent la valeur sacrée de l’homme dans leur propre pays, ils agissent à leurs risques et périls car ils violent le Droit international de l’Humanité [TMI, XIX, p. 495].

Ces précisions effectuées, on comprend pourquoi, en 2003, G. W. Bush a tranquillement pu revendiquer le droit de renverser les régimes qualifiés de tyranniques.
Il n’a rien inventé ; les expéditions en Serbie, en Afghanistan et en Irak sont des conséquences logiques du procès de Nuremberg.

Depuis Nuremberg, toutes les lois traditionnelles qui régissaient le monde ont été balayées : il n’y a plus de souveraineté, il n’y a plus de morale fixée. Les frontières sont évanescentes, les mots n’ont plus de sens défini, les actes ne sont plus jugés en eux-mêmes. Tout est apprécié au gré des circonstances, afin - naturellement - d’obéir à la seule loi qui reste : « Big Brother a raison, Big Brother ne peut être ni poursuivi ni condamné ».

Voilà pourquoi depuis plusieurs années maintenant, nous ne cessons, Carlos Porter et moi-même, de dénoncer le procès de Nuremberg. Il ne s’agit pas d’une monomanie ; il s’agit de détruire ce qui est le fondement du pouvoir mondialiste. Tant que cette œuvre primordiale ne sera pas réalisée, Big Brother étendra son empire..

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[1] Voy. Le Quotidien de la Réunion, 6 juin 2004.
[2] Voy. Avions, n° 135, juin 2004, pp. 4-5.
[3] Voy. Le Monde, 18 avril 2003, p. 5, col. F.
[4] Voy. TMI, I, p. 185 (jugement) : « Celui des buts que le parti nazi semble avoir considéré comme le plus important, et dont presque tous les discours publics faisaient mention, était d’effacer la “honte” de l’Armistice » et TMI, II, p. 118 (exposé du procureur américain Robert H. Jackson) : « La politique nazie comportait des buts qui, on l’a toujours reconnu, ne pouvaient être atteints en Europe, que par une nouvelle guerre plus heureuse ».
[5] Voy. TMI, XIV, p. 542 (contre-interrogatoire de l’accusé Baldur von Schirach par le substitut du procureur général soviétique, le général Alexandrov) : « GÉNÉRAL ALEXANDROV. - Reconnaissez-vous que la jeunesse hitlérienne avait pour mission d’inculquer aux jeunes Allemands, dès l’âge de neuf ans, l’idéologie fasciste ? »
[6] Voy. TMI, VI, p. 439, exposé du procureur général adjoint français Charles Dubost. De son côté, le procureur général américain Robert H. Jackson déclara : « Le cauchemar nazi a marqué le nom allemand d’un sens nouveau et sinistre dans le monde, ce qui fera piétiner l’Allemagne pendant un siècle » (TMI, II, p. 112).
[7] Il ne put que répondre : « Oui, je le sais », avant d’ajouter ironiquement : « J’espère que vous ne vous comparez pas à la Suisse, pourtant ? »
[8] TMI, XXII, p. 420. On notera que B. von Shirach fut finalement acquitté du chef d’accusation n° 1, « crimes contre la Paix ». Les juges estimèrent : « Malgré le caractère militaire de l’activité de la “Hitler Jugend”, il ne semble pas que von Schirach ait joué un rôle quelconque dans la réalisation des projets de Hitler visant à une expansion territoriale par le moyen de guerres d’agression, ou qu’il ait participé en quoi que ce soit à l’élaboration des plans ou à la préparation de l’une de ces guerres » (TMI, I, p. 341). L’accusé fut reconnu coupable de « crimes contre l’Humanité » en tant que Gauleiter de Vienne, place qu’il avait occupée à partir de juillet 1940. Il fut condamné à vingt ans de prison.
[9] Voy. La Documentation catholique, n° 4, 1er mars 1919, col. 111.
[10] Voy. L’Image, n° 206, janvier 1919.
[11] Voy. Serge Zeyons, Le roman-photo de la Grande Guerre (éd. Hier & Demain, 1976), p. 11.
[12] « Il faut s’entendre, déclara G. Delory en 1918 après la libération de Lille, guerre, oui, mais pas guerre de conquête, guerre de droit » (Voy. L’Image, n° 200, novembre 1918). De son côté, le 17 septembre 1918, Georges Clémenceau parla du « redressement historique qui nous était dû », d’une « attente silencieuse [de 1871 à 1918] du jour inévitable qui nous était dû » (Id.).
[13] Voy. Point de Vue, 15 juin 1945, article intitulé : « Les cobayes humains du Struthof ».
[14] Voy. Camp de concentration. Natzwiller Struthof (Imprimerie A. Humblot & Cie, Nancy, 1973), p. 26.
[15] Voy. L’Enfer Nazi (éd. du Bois de Boulogne, 1979), p. 137.
[16] Voy. L’Impossible oubli. La déportation dans les camps nazis. (éd. de la FNDIRP, 1989), p. 60.
[17] Voy. TMI, XIX, pp. 98-100. L’avocat citait en particulier la revue Times du 24 juin 1946. On y apprenait que des savants américains avaient expérimenté sur 3 000 Indiens des injections contre la tuberculose. 38 décès avaient été enregistrés. Le substitut du procureur général britannique, M. Elwyn Jones, ne put contester les faits. Il se contenta de déclarer que le Times n’était pas une « revue scientifique » et qu’on ignorait si les Indiens s’étaient, ou non, portés volontaires.
[18] Pour tous ces faits, voy. La Haute-Marne Libérée, 29 décembre 1993, article intitulé : « Tests nucléaires sur des humains : les USA aussi ». Le soir, à 20 heures, la chaîne de télévision française TF1 consacra un reportage à cette affaire. Voy. également Science & Vie, n° 917, février 1994, pp. 53 et suivantes, article intitulé : « Le scandale des cobayes humains ».
[19] 29 décembre 1993, Journal de 20 h. diffusé sur TF1. Les propos d’A. Khan sont rapportés en substance.
[20] Voy. L’Impossible oubli. La déportation dans les camps nazis (éd. de la FNDIRP, 1989), p. 41 : « Il faut également noter, parmi les causes de mortalité, les expériences pseudo-scientifiques auxquelles se livrèrent les médecins SS sur les détenus cobayes : effet du froid, de la pression, de la dénutrition, du typhus etc., recherches racistes sur l’eugénisme, la fécondité.. ».
[21] TMI, II, p. 139 : exposé du procureur général américain Robert H. Jackson.
[22] « […] plus de 20 000 personnes [furent] tuées dans la ville de Leningrad par les barrages d’artillerie et les bombardements sauvages » (TMI, I, p. 51, acte d’accusation) ; « Pendant les 900 jours du siège ininterrompu de Leningrad et l’occupation de ses faubourgs, les envahisseurs germano-fascistes ont commis des forfaits innombrables et des atrocités à l’égard de la population civile. Les Allemands ont jeté sur Leningrad 107 000 bombes explosives et incendiaires, 150 000 obus de gros calibre […]. Les bombardements aériens et les bombardement d’artillerie ont fait 16 747 morts et 33 782 blessés » (TMI, VII, 572). On notera que les 16 747 morts avancés par l’accusation soviétiques sont devenus « plus de 20 000 » victimes dans l’acte d’accusation.
[23] Souligné par moi. Voy. Searchlight, février 2003, p. 25 : « He [Vincent Reynouard] conveyed his apologia of nazi fascism through denunciation of the military measures by which the allies brought the Third Reich to its knees ».
[24] J. Friedrich, Der Brand, éditions Propylaen, 2002.
[25] Le 21 novembre 1945 à Nuremberg, R. Jackson fit l’aveu suivant : « Il est vrai que les Allemands nous ont appris les horreurs de la guerre moderne, mais les ruines qui s’étendent du Rhin au Danube démontrent que nous-mêmes, ainsi que nos Alliés, n’avons pas été de mauvais élèves » (TMI, II, p. 111). A propos du livre de J. Friedrich, La Libre Belgique a écrit : « Il faut avoir les nerfs solides pour suivre ce récit révulsif sur l’extraordinaire cruauté des stratèges alliés » (Voy. La Libre Belgique, 24-25 décembre 2002, p. 39, col. A).
[26] Un des plus actifs saboteurs s’appelait Schlageter. Appréhendé par les autorités françaises, il sera fusillé le 23 mai 1923 à Golsheimer-Heide. Notons qu’à la différence des Résistants français, les membres des corps francs allemands ne tuèrent aucun ressortissant français lors d’attentats ; ils déboulonnaient les rails, coupaient les voies ferrées, endommageaient les foyers des locomotives, sabotaient les signaux, décrochaient les câbles des puits de mine (voy. Albert Rivaud, Le Relèvement de l’Allemagne. 1918-1938 [Librairie Armand Colin, 1939], pp. 90-1).
[27] Voy. TMI, XV, p. 517, contre-interrogatoire du général Jodl par l’avocat général britannique G.D. Roberts : « M. ROBERTS. - […] j’estime que le Droit international n’a jamais légalisé l’exécution d’otages. ». Voy. également TMI, V, p. 402, exposé du procureur général français François de Menthon : « Ces pratiques [exécution d’otages] contraires à l’article 50 de la Convention de La Haye qui prohibe les sanctions collective, soulèvent partout un sentiment d’horreur […] ». Il est vrai que l’article 50 stipule : « Aucune peine collective, pécuniaire ou autre, ne pourra être édictée contre les populations à raison de faits individuels dont elles ne pourraient être considérées comme solidairement responsables ». Toutefois, l’application à la lettre de cet article aurait laissé les armées d’occupation sans défense face à l’action de maquisards qui, le plus souvent, restaient insaisissables. Voilà pourquoi très rapidement, la question des représailles, donc de l’exécution d’otages, fut discutée au-delà du cadre de l’article 50. Elle l’était encore en 1939, sans que les débatteurs ne soient arrivés à une conclusion. A Nuremberg, ainsi, Alfred Jodl rappela que si le Droit international n’avait pas légalisé l’exécution d’otages, « la prohibition n’en a jamais été expressément stipulée » (TMI, XV, p. 517]. Son avocat, Maître Exner, avait professé pendant dix ans le Droit international à la Faculté. Il déclara qu’en matière de représailles, un seul point était admis : « on ne doit pas exercer de représailles contre les prisonniers de guerre » (TMI, IX, p. 348). « Tout le reste, poursuivit-il, est matière à discussion et n’intéresse pas le Droit international » (Id.). En particulier, il n’était pas exact « d’affirmer la nécessité d’un rapport supposé raisonnable entre la mesure de représailles et l’acte à sanctionner » (Ibid., p. 349).
[28] Voy. notamment TMI, I, p. 308. Comme ultime moyen de défense, Keitel déclara qu’il avait obéi à des « ordres supérieurs », ce que l’accusation ne put contester. Mais l’article 8 du statut du Tribunal stipulait : « Le fait que l’accusé a agi conformément aux instructions de son gouvernement ou d’un ordre supérieur hiérarchique ne le dégagera pas de sa responsabilité […] ». Dans leur arrêt, les juges se contentèrent donc d’écrire : « Il [Keitel] invoque, pour sa défense, sa qualité de soldat et l’argument de l’ “ordre supérieur”, que l’article 8 du Statut rejette comme moyen de défense » (TMI, I, p. 309). Et le tour était joué..
[29] TMI, IX, p. 347. Voy. aussi TMI, VII, p. 119, exposé du substitut du général français M. Quatre : « Sous le prétexte d’investigations ou de représailles contre des éléments locaux de la résistance, officiers et soldats allemands observèrent scrupuleusement ces consignes [de prendre « des mesures collectives contre la population de villages entiers »], données par le chef de l’État-major d’opérations ».
[30] Voy. TMI, VI, pp. 417-430. A propos des viols, j’entends souvent des personnes de nos milieux prétendre que les armées allemandes ne sont pas rendues coupables de tels forfaits. C’est une erreur. A Nuremberg, H. Göring lui même déclara : « Dans beaucoup de cas, j’ai annulé des condamnations trop douces, spécialement s’il s’agissait de viol » (TMI, IX, p. 385). C’est la preuve que des soldats du Reich avaient violé.
[31] « Terrorisme et extermination sont intimement mêlés dans tous les pays de l’Ouest » (TMI, VI, p. 412).
[32] Voy. Contact J, n° 162, février 2003, p. 3, col. A.
[33] « Ou bien les vainqueurs doivent juger les vaincus, ou bien nous devons laisser aux vaincus le soin de se juger eux-mêmes. Après la première guerre mondiale, nous avons appris combien il était futile de se fier à cette dernière solution » (exposé préliminaire de R. H. Jackson le 21 novembre 1945 à Nuremberg ; voy. TMI, II, p. 109.
[34] L’article 7, en effet, stipulait : « La situation officielle des accusés, soit comme chefs d’État, soit comme hauts fonctionnaires, ne sera considérée ni comme une excuse absolutoire, ni comme un motif à diminution de la peine ».

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